Avant toute chose, il est nécessaire de rassurer le lecteur : l’ensemble est bien mieux que l’affiche -franchement pas belle- qui présente l’événement. On préfère croire que c’est là le résultat d’un concours dans les écoles primaires parisiennes. Rappelons que ladite affiche se compose de la célèbre avenue découpée dans un plan et collée sur un fond arc-en-ciel, avec effets d’ombre.
Mais venons-en à l’exposition. D’une part, l’art descend dans la rue et on ne s’en plaindra pas. Ensuite, les œuvres viennent d’artistes des cinq continents, plus ou moins connus du grand public et c’est là un bon moyen de faire leur connaissance.

Après une première expérience, fructueuse, il y a trois ans, abordant la sculpture de Rodin jusqu’aux années soixante, les Champs-Elysées se parent aujourd’hui, en cinquante-deux œuvres, de la création de ces trente dernières années. A commencer par les toiles tendues de Daniel Buren qui n’ont rien de sculptural mais qui agissent comme un appel en donnant des airs de fête à l’avenue. On l’aura compris, il n’y a pas que de la 3D. Pour preuve, les inscriptions au sol, au niveau des passages piétons, de l’américaine Lawrence Weiner, les deux portraits d’inconnus de plus de cinq mètres sur quatre, pendus à l’entrée des Champs-Elysées, de Braco Dimitrijevic. Quant au Scotch Gambit peint sur toile de Panamarenko, bien qu’on ne puisse faire abstraction du volume et de la solidité du cadre, il reste pourtant bien ancré dans la tradition picturale.
Exercice périlleux que celui d’exposer des œuvres dans ce lieu aussi vaste. Le Lièvre de Barry Flanagan, par exemple, a bien du mal à ne pas se laisser manger par l’architecture imposante du Grand Palais. D’ailleurs, la bonne idée du parcours de cette exposition est qu’il ne suffit pas d’arpenter les allées sablonneuses de l’avenue pour tout voir. Des sculptures se cachent dans les arbres –Physalis suspendus de Katsuhito Nishikawa-, dans l’herbe –Arcs sculptures x 5 de Bernar Venet-, entre les voitures –L’Homme sur la remorque de Stephan Balkenhol-, et « tout là-bas, derrière » –Femmes marchant sous un échafaudage de George Segal.

Cet isolement semble d’autant plus bénéfique pour les œuvres que lorsque l’on regarde n’importe quelle autre sculpture exposée en enfilade dans l’allée, l’œil embrasse toutes celles qui se succèdent dans la perspective. Alors les lignes et les courbes s’interfèrent, les matériaux se mêlent, les desseins aussi. On a tendance à passer de l’une à l’autre en poursuivant sa marche. Heureusement, certaines savent s’imposer : Legacy Mantle, immense veste « Mao » de Sui JianGuo, le Mur de Jean-Pierre Raynaud, ou Le Passage de Brigitte Nahon.