Le programme des manifestations de la galerie de la Seita reste dans la ligne initialement tracée par les expositions de Schiele, Klimt, Kokoschka, Spilliaert, Pascin, etc. Ces événements permettent de replacer des artistes peu connus du grand public dans la chronologie et la mouvance stylistique de noms beaucoup plus répandus. Ainsi Jawlensky se situe dans les avant-gardes du début du XXe siècle, non loin de Kandinsky avec qui il partage de nombreuses convictions picturales. Il est d’ailleurs surprenant de constater à quel point leurs réalisations, quant à elles, diffèrent. Jawlensky, au contraire de son ami peintre, ne s’éloigne pas de la figuration même s’il lui fait parfois quelques entorses.

Cette exposition présente essentiellement ces quelques entorses : les visages géométriques. L’artiste les a poussés vers un minimalisme qui leur confère une valeur sacrée. Car curieusement, ces faces rappellent des mosaïques ou des icônes de la glorieuse époque de Byzance lorsque la recherche de spiritualité dans les arts permettait de dépasser les traditionnelles nécessités d’imitation du réel. Dans les œuvres de Jawlensky, le hiératisme des visages ainsi formés de traits se trouve contredit par la vivacité et la violence des couleurs. Elles en disent beaucoup sur un caractère, une humeur, un sentiment. De cet ensemble de visages que propose l’exposition, on retiendra aussi ceux plus imitatifs de la première salle : cette femme rêveuse à l’air totalement hébété, cette jeune fille aux grands yeux en amande semblant regarder au loin avec insistance. Le trait du pinceau, venant souligner quelques parties du visage, se fait à la fois précis et caressant. Il paraît chargé d’émotion, décrivant avec une certaine facilité la douce courbe d’un sourcil, la moue d’une bouche, et exprimant, par sa douceur, toute l’affection du peintre pour son modèle. Bien sûr, lorsque la géométrie entre dans l’art de Jawlensky, ses tableaux se font plus radicaux mais une certaine jubilation dans la création reste lisible et le plaisir du spectateur, aussi.