L’exposition Ailleurs au Carré d’Art, à Nîmes, permet d’appréhender le singulier travail de l’artiste allemand Wolfgang Laib à travers neuf œuvres représentatives de ses recherches de 1975 à 1999. Wolfgang Laib utilise du pollen, du riz, de la cire d’abeille, du marbre et du lait. L’emploi de ces matières premières implique patience et humilité : patience pour la récolte du pollen et le polissage du marbre, humilité par rapport à la nature, origine de toutes les œuvres de l’artiste. Depuis ses premières créations en 1975, les Pierres de lait (plaques de marbre de Carrare blanc polies sur lesquelles est versé du lait), Wolfgang Lai répète les mêmes gestes, comme se répètent des cérémonies : son œuvre contient un certain mysticisme… Chaque salle du Carré d’art ne présente d’ailleurs qu’une seule installation (ou très rarement deux), telle une succession de temples dédiés chacun à un Carré de pollen ou aux Deux maisons de riz, ou encore à la Chambre des certitudes. La proximité entre les œuvres n’est d’ailleurs pas envisageable. Chacune, par le minimalisme de sa conception, emplit paradoxalement l’espace ; de plus, elles appellent toutes à une contemplation méditative qui ne supporte que l’isolement et le silence.

L’œuvre de Wolfgang Laib n’est pas accessible d’emblée, disons qu’elle demande une certaine disponibilité qui s’inscrit dans un temps plus lent. Ce à quoi le texte de présentation, distribué à chaque visiteur, ne prépare pas, malgré son ambition. Une personne, penchée sur sa feuille, s’est exclamée : « Que c’est pompeux ! ». Le travail de Laib étant déroutant, les visiteurs se raccrochent au texte introductif, risquant alors d’associer le « pompeux » de l’écrit à l’artiste et à son travail. Il ne faut pourtant pas hésiter à se perdre dans la contemplation du petit carré de pollen de pissenlit dont le jaune intense irradie ; ni à s’enivrer de l’odeur chaude de la cire d’abeille qui nous enveloppe dans la Chambre des certitudes. Car c’est une œuvre intime que nous livre Wolfgang Laib et qui s’adresse à chacun dans son individualité. Il faut d’abord savoir s’approprier le travail de l’artiste, libre à chacun ensuite de poursuivre sa propre réflexion.