En insérant ce disque dans notre platine, on ne peut s’empêcher de se remémorer le temps ou Big Dada était une des flèches du hip-hop dérivant (cf. la somptueuse compilation Black whole styles éditée en 98). On pense aussi à la fuite du géant Roots Manuva, qui vient de quitter le bateau du grand Dada pour voguer sur des ondes un peu plus mainstream, certainement. Ce qui explique peut-être sa présence ici sur quatre titres, sûrement les derniers estampillés du sceau du bébé hip-hop des Ninjas britanniques. Si la galette Boucement revolution n’a rien d’une révolution bounce, elle propose tout de même quelques appétissantes tranches de dancehall-contact et de rap électrique en provenance d’outre-Manche, même si quelques passages ont du mal à être ingurgités.

Tombant parfois dans des recoins afro-beat et des gluaux ragga (le titre Izwha du sieur Gamma) qui feront fuir les puristes du hip-hop made in US, le disque bénéficie heureusement de l’apport sonique de Dj Excalibah, qui met ici en boîte les charges hip-hoppesques avec fluidité et prestance. Pour parler des sons qui fâchent, on évoquera les sirupeux Life without you de Part 2 et Leigh Stevens, qui patinent respectivement dans des refrains R&B poisseux et du ragga alangui, sans jamais réussir à ensorceler l’auditoire (disons qu’on s’ennuie vraiment, pour être abrupt). On se cramponne ensuite joyeusement au revigorant No more bananas, qui jumpe dans tous les sens et pulse de joutes verbales prenantes, que s’empressent de récupérer en vol New Flesh sur Zero gravity lotek relick, un des passages de la compil’ les plus affriolants. Cabotant sur des sonorités faites d’électrons libres, Part 2 et Toastie Taylor nous rappellent au bon souvenir du EP Electronic bombardment (1997) et de leur premier album Equilibriums (1999). Mais le véritable premier obus de cette compilation n’arrive qu’en fin d’album, sur le titre Witness the swords… Sorte de mix trash qui musarde entre Swords in the dust et le hit underground Witness, ce titre bouncy met en avant l’éminent Roots Manuva, et laisse Rodney P et ses compères (Fallacy, Blackitude, Big P et Skeme) décramponner un peu de phrasés lestes. Quant au Mc Gamma (nouvelle coqueluche de Big Dada), il s’amuse à cracher son cockney jamaïcain sur le réjouissant Killer apps featuring Shadowless. Mais si la relève de Big Dada (du côté des Anglais) repose sur les épaules de Monsieur Gamma, on lui souhaite de se réchauffer un peu plus les cordes vocales, de prendre beaucoup de miel et de travailler un peu plus son flow.

On attend avec impatience les prochaines sorties Big Dada, à savoir l’album des Majesticons (tenus en laisse par Mike Ladd dans Beauty party), les antagonismes verbaux de Bigg Jus (qui devrait nous droper une extended version de son Black mamba serums sous peu), mais aussi, et surtout, les errements rapologiques de MF Doom (qui officiera cette fois ci sous le nom de King Ghidra). En attendant, on va se réécouter la compilation Black whole styles