Trois ans après la sortie en Europe de son premier album, le tandem de Washington DC remet le couvert. Entre-temps Eric Hilton et Rob Garza ont tourné, promu leur volume de la série DJ kicks, se sont fait faucher des bandes du futur The Mirror Conspiracy et ont généralement pris leur temps pour peaufiner leur nouvelle production. Ceux qui s’attendaient à sombrer dans l’extase du clubber grâce à ce disque seront déçus : Thievery Corporation a voulu cette fois qu’on écoute sa musique, pas qu’on transpire en s’agitant dessus.

Et justement on a envie d’écouter The Mirror Conspiracy, d’y traquer les vastes influences, clins d’œil et références que ces deux collectionneurs de disques fous de sons ont accumulés ici. Indienne, brésilienne, électronique, exotique, toute la musique qu’Eric et Rob aiment se trouve là éparpillée sur treize chansons ou instrumentaux souvent brefs, selon les standards electro en vogue. Thievery Corporation bombarde l’auditeur de ses idées et passe à autre chose avant d’avoir pu le lasser. Même attitude concernant les samples traités ici comme ce qu’ils devraient toujours être : des échantillons et non des phrases musicales. Et dernière trouvaille du duo pour mieux capter l’attention, les interventions de Lulu serveuse d’origine française improvisée chanteuse et parolière. Elle s’exprime avec une nonchalance blasée, bourrée de classe, offrant une texture supplémentaire aux compositions mille-feuilles du duo. Le Monde est sublimé par sa seule présence. Et si le texte est un brin décousu et alambiqué qu’importe : on préfère sa sonorité à son sens éventuel. Lebanese blonde qu’on a pu découvrir précédemment en single salue Les Baxter avec ses percussions exotiques et ses accents indiens synthétiques. Enfin The Hong Kong triad suit la tendance exploitation sans abus ni caricature sonnant comme un hommage sincère au genre et non un engouement soudain pour les bandes originales de films des années 70. Une fois qu’on l’a savouré, The Mirror Conspiracy donne envie de partir à la recherche des sources de ses auteurs et d’élargir ses horizons discographiques. Un joli tour de force.