Airs au luth du XVIe siècle. Brian Asawa (contre-ténor), David Tayler (luth).

Les Parisiens ont découvert Brian Asawa l’an dernier, lors de la reprise du très kitsch Giulio Cesare, à Garnier. Les provinciaux pourront bientôt l’entendre ou le réentendre sous la baguette industrieuse de Christophe Rousset : le rarissime Admeto* handelien, et un Mithridate** au cast ébouriffant (choc Bartoli/Dessay, et l’excellente Sandrine Piau -disque à suivre chez Decca…).

En attendant, passage obligé pour tout contre-ténor qui se respecte -et qui tient tant soit peu à se faire (re)connaître-, voilà l’américain qui vient pousser, pour son premier récital chez BMG, ses « Come again, sweet love… » et autres « Willow song », jadis immortalisés par l’immense Deller. The best of Dowland, donc, le grand neurasthénique élisabéthain, plus quelques pages de Thomas Campion, contemporain moins connu quoique plus « audacieux » dans ses partitions comme dans sa prosodie. Plus, enfin, quelques songs populaires, retranscrites par David Tayler à partir des manuscrits originaux -dont le magnifique « O Death, rock me asleep » ou ce « Dark is my delight » qui donne son nom à cet album.

Timbre androgyne, technique sans faille et projection exceptionnelle : on n’apprendra rien dans ce florilège que l’on ne savait déjà d’Asawa, qui possède à coup sûr toutes les qualités d’un grand contre-ténor. Reste que tout cela manque cruellement d’engagement, d’émotion, de vie quoi… toutes choses d’autant plus surprenantes quand on connaît la personnalité plutôt explosive de l’américain sur scène : passant allègrement de Tolomeo au prince Orlofsky de La chauve-souris, de Semele à Baba le Turc dans The rake’s progress ! Un disque beau, donc, mais forcément en retrait de nos attentes.
Aseptisé, à la mode de trop nombreuses productions d’aujourd’hui, en quête du plus-que-parfait vocal, mais au détriment de tout le reste.

* Opéras de Montpellier, le 4 mars. Renseignements : 04 67 60 19 99
** Opéra national de Lyon, les 8 et 10 mai. Renseignements : 04 72 00 45 45