Désormais incapables d’oublier des rancœurs vieilles comme papa-maman, les quelques Beach Boys qui ont survécu n’ont plus grand chose à offrir sinon un passif brinquebalant déjà largement rentabilisé par une tétrachiée de compiles offrant peu ou prou la même marchandise. C’est qu’ils sont tombés dans les oubliettes de l’Histoire, nos bons vieux barbus-chevelus, et personne n’attendait une anthologie de leurs raretés exceptés quelques irréductibles. Jusqu’à la sortie de ce Endless harmony soundtrack. Ok, ça n’est pas vraiment une anthologie, plutôt la bande-son d’un documentaire américain récent. Malheureusement, séparée de son support audiovisuel, cette compile ressemble à un vaste foutoir manquant sérieusement d’exhaustivité. Parce qu’on ne rassemble pas les inédits de 30 ans de carrière sur un malheureux CD.
Cet effort d’indulgence accepté, on peut savourer quelques pépites. Tout d’abord, deux inédits excellents. Le premier, Soulful old man sunshine, mix de gospel, de R’n’B, et de pop « spectorienne ». Magnifiquement arrangé et furieusement entraînant, il laisse entrevoir ce qu’aurait pu être l’abum très Motown-like Wild honey avec une meilleure production. Le deuxième, Loop de loop, est un morceau collectif dont les arrangements, très extravagants, rappellent un peu Sergeant Pepper. On passera par contre rapidement sur la chanson incroyablement faux-cul de Mike Love, Brian’s back, et sur le Barbara d’un Dennis Wilson en petite forme. Du côté des « alternate takes », on relèvera quelques surprises dont un Help me Rhonda aux chœurs enrichis et un mix somptueux de ‘Til I Die. Quant aux passionnés de la « méthode Wilson », ils pourront toujours se pencher sur les démos des inédits précités, de Heroes and villains (H&V) et de Breakaway. Intéressant mais relativement anecdotique au vu du contexte.
Finalement, ce sont les nombreux morceaux live qui retiendront notre attention. Surtout ceux datant d’après 1967. Les Beach Boys, ayant perdu tout espoir de remonter au score face aux Beatles, s’autorisent quelques libertés d’interprétation. Ils frisent parfois l’excommunication lorsqu’ils reprennent H&V un peu trop énergiquement ou lorsqu’ils marient le spirituel Wonderful avec une chanson des Flames. Mais il leur sera beaucoup pardonné à l’écoute d’une version survoltée de Darlin’ et d’une interprétation toute empreinte d’émotions de Long promised road, une des meilleures chansons du regretté Carl Wilson.
Bref, Endless harmony n’apprendra pas grand chose aux vrais fans sinon deux ou trois nouvelles sensations, mais c’est une manière comme une autre d’approcher la gigantesque manne musicale fournie par un groupe occupant une place à part dans l’univers du rock américain.