On a eu droit au « novo dub from Vienna », à la réactualisation du krautrock d’outre-Rhin (lire dans le texte : rock choucroute), ainsi qu’à une certaine vision intellectualo-techno de toutes les scènes de Cologne. Se plaçant délibérément en opposition à tous ces sous-mouvements musicaux de pointe, Syrup donne dans la facilité la plus sucrée, dans l’easy-listening le moins ardu, bref dans le genre de fantaisie douce qui sollicite peu l’auditeur.

Construit linéairement, mais avec intelligence, sens du rythme et du rebondissement sonore, l’album assume, dès les premières notes, son statut d’interlude musical de luxe : synthés détunés, batterie aérienne, guitare acidulée et basse plus que discrète. Gentiment clinquante, la musique des frères Weissenfeldt ne s’impose jamais en force. Elle diffuse plutôt une ambiance festive bon chic-bon genre, aux croisées de l’électro-rythmique, de fiestas brésiliennes légèrement compactées, de musiques de foire remixées et de rock instrumental déridé. On ne saurait reprocher le caractère relativement impersonnel de cette bande-son pour un loft-cocon branché ou, pourquoi pas, pour une Croisière s’amuse à la mode technoïde. Jamais ringard dans l’approche, pas plus que dans l’exécution, Syrup arrive à tenir une ligne de conduite, qui navigue au ras de territoires le plus rapidement beaufs : disco du samedi soir, lounge bon marché et rock de comices. Belle négociation donc que ce virage très contrôlé dans les univers dépassés de musiques, qui, combinées, créent de beaux plans mélodiques et harmoniques. On l’aura donc compris, ce style aux accents vieillots est finalement l’apanage de jeunes de la hip-attitude de Berlin. Et c’est tout naturellement qu’on retrouve ce projet délibérément fun et relaxant sur le label qui monte, Compost Records, un des meilleurs éditeurs actuels de sons décalés. Une friandise musicale en guise de lapin de Pâques.