Que dire de plus d’un album de plus de Stereolab ? Les cordes vocales délicates de Laetitia, les lyrics marxistes, les basses rondes égalisées avec un peu de medium, le Farfisa, ce mélange unique d’Exotica, de pop 60’s et de Krautrock, on les retrouve sur chaque nouvel album du groupe. Et si les variations entre chaque disque semblent infimes, pourtant chaque nouvelle sortie apporte son lot d’espérances, l’espoir que le groupe ira au-delà de ses habitudes et du cercle équidistant de ses admirateurs. Or, cet espoir est toujours déçu. Pourtant, ce n’est pas faute de les aimer, ces endives anglaises.

Fab four suture, compilation de singles et d’inédits, est un excellent album, si on le compare à la production musicale générale, mais ce n’est qu’un album de plus de Stereolab, la répétition obsessionnelle des mêmes figures de style virtuoses, des mêmes structures pas possible, des mêmes soli de hautbois en pano sur la gauche. Hors les interventions divines de Jim O’Rourke ou de Sean O’Hagan en d’autres temps (et on voudrait encourager le groupe à donner dans les featurings, s’affronter un peu à l’altérité, arrêter ce jeu de gamin autiste), les fondamentaux de Stereolab restent les mêmes. Permanence, continuité, durée, sempiternité, est-ce qu’on se lasse ? Non, bien sûr. Kyberneticka babicka, part 1 et part 2 jouent adroitement sur des boucles (Phil Glass) et des harmonies vocales (les Beach Boys de Fluoressence), c’est hypnotique, c’est prenant, c’est un peu, joliment, autiste ; Vodiak est amusant, avec ses petits sons concrets dans les coins, son déroulé de batterie, ses entrelacs vocaux, mais bon. Stereolab est toujours très doué pour les titres-slogans, rétro-futuristes, des sortes de mutations organique / machinique, de « machines désirantes » : Get a shot of the refrigerator avec sa basse et son beat un peu funky, a des petits côtés sinistres, des accords mineurs et des synthétiseurs un peu dark, ça ne mange pas de pain. Sinon, c’est souvent joli et gentil. Stereolab, groupe gentil ? On a tellement entendu ça, on a envie de leur dire que c’est vrai, qu’ils sont trop gentils, trop mignons, un peu bébêtes finalement, c’est vrai, qu’il serait temps de devenir méchant comme des adultes, de se coltiner un peu au monde. Laetita, qui parle toujours de révolution, semble n’avoir jamais vraiment accompli la sienne, personnelle (même pas avec Monade). Ca ronronne un peu quoi.

Bon, sinon, c’est un excellent album, évidemment. On l’écoutera encore de temps en temps (peut-être moins que Emperor tomato Ketchup ou Doots and loops, mes albums fétiches). C’est un album qui satisfera (pas plus) les fans et qui permettra aux nouveaux venus de découvrir un des meilleurs groupes pop de notre époque. Mais on les aime tellement, ces endives anglaises, qu’on aimerait bien les aimer encore un peu plus. Encore un effort.