Sortis in extremis du trou en 1997 avec un disque –The magical world of The Strands– de lendemains (heureux) de prise d’héroïne, les frères Head récidivent, cette fois renouant avec le nom de Shack, avec ce HMS Fable. Il faut se faire une raison : nous ne sommes plus à l’époque de cette pop guillerette sous haute influence du Forever changes de Love, et qui fit les beaux jours des Pale Fountains, avant la plongée… les années d’absence, passées à fouler les docs quasi déserts de Liverpool en quête de dope. La voix de Michael Head a mûri, renforcée dans les graves, sans pour autant abandonner la délicatesse de ses débuts. Et force est de reconnaître qu’il sait toujours composer un morceau.

Si le premier simple (après le départ en trombe de Natalie’s party, au refrain entêtant), Comedy, n’est pas totalement réussi -trop d’emphase sans doute-, ce qui suit mérite une attention particulière. Car malgré le gâchis (partiel) d’une production qui mise de nouveau sur lui -soit un peu poussive-, rien ne vient entamer de manière définitive l’idée que l’on se faisait de l’insolence de son talent de songwriter. Pour preuve le départ de Pull together (après ça se gâte, putains de chœurs !) avec cette voix qui se suffit presque à elle-même pour dire les désastres intimes ; puis l’orgie orchestrale de Beautiful (du cinémascope pas indispensable), avant de s’accrocher à Lend some dough, parfaitement orchestrée : équilibre entre mélodie et rythmique. On respire. Avec Captain table, Head regarde dans le rétroviseur, voit encore Love à l’horizon, et se flanque d’un titre psyché tout doux tout doux. Itou de Re-Instated, mais la compo tient mieux le coup (« it’s not too late baby… »). Yeah ! Yeah ! Yeah !

Conséquence de quoi, le titre suivant (I want you) balance, et avec quelle grâce, du « I want you/I need you/I’ve got you ». Et malgré un bref moment de guitare-héros du frangin John, ça fonctionne à merveille. On danserait dessus jusqu’au bout de la nuit… seul ! Pour conclure, signalons que Daniella (excellent par sa retenue) n’a aucun rapport (on s’en doute ducon !) avec le hit des lobotomisés franchouillards sorti il y a plusieurs étés. C’est aussi à cela que l’on mesure l’écart entre deux cultures. Mais pour le coup, c’est bien ce HMS Fable qu’il faudrait écouter tout l’été, avec force provision de Vodka-Martini, sous l’azur, le cul dans un transat, en attendant l’apocalypse promise. Car voilà un disque dionysiaque fait pour revenir de temps à autres sur la platine, quand tout sera fini, ou presque.