Apôtre d’un certain goût plutôt anglais pour la pop sucrée version épure électronique, Saint Etienne avait fait sien ce son chic et quasi lounge, précurseur du croisement bénéfique entre rock chanté et electronica discrète. Empreinte de gimmicks et de clins d’œil, leur musique ne peut être envisagée qu’en rapport avec une vision historique de la pop anglaise. Avec des mélodies en boucle bourrées de samples et d’incursions fugitives de loops déjà plus qu’usités, le collectif revendique haut et fort son héritage musical, sans s’en étouffer. Good humour avait amorcé son succès, Sound of water devrait le parachever.

Ce nouvel opus, en effet, apporte un visage plus intrigant que les albums et les maxis précédents du groupe. Fruit d’une collaboration très active avec les Allemands de To Rococo Rot, le son de Saint Etienne, qui tendait un peu vers la redite, évolue désormais dans des paysages électroniques bcbg mais efficaces. Et même si ce son racé a quelques antécédents plus brillants encore -on pense à Tarwater ou Village Of Savoonga-, la recette marche mieux que jamais. Vocodages éthérés, nappes synthétiques loin du new age, stratification intense des couches musicales, percussions éparses, bref, tout l’attirail du petit post-rockeux made in Cologne. Là où l’alchimie entre le jazz et le krautrock s’effectuait, la magie s’opère pareillement entre la pop du duo anglais et leurs invités plus pointus. Sans pourtant s’inscrire en rupture totale avec ses précédents albums, Saint Etienne apporte ainsi une nouvelle vision plus moderne d’une avant-pop suivant la hype, sans trop y sombrer. Sound of water symbolise ainsi ce qu’on aimerait de plus en plus que le rock devienne, soit une musique d’ouverture et de croisements en tous genres. Un seul regret malgré tout : l’aseptisation du propos et la platitude de la production apportant trop de propreté à un ensemble qu’on aurait aimé plus rugueux.