On n’est pas vraiment habitué, en musiques électroniques, aux concept-albums. Le travail sur les sons semble la plupart du temps suffire à définir une théorie musicale. Le jeune musicien français Olaf Hund (Hund veut dire « chien » en allemand, parce que ce monsieur a toujours adoré et vécu avec des chiens) est lui un habitué des projets conceptuels, depuis An invisible touch en 96, un album de musique relaxante pour accompagner les massages, jusqu’à la série I’m so blue flower, musique thérapeutique pour deux personnes, dont les quatre maxis vinyles dessinent une fleur. Il ne déroge pas à cette règle avec la série Kitch kitch ici compilée sur un CD et 32 plages.

Ces 32 plages instantanées décomposant les 10 titres de consommation immédiate de cette série electro-kitch et bondissante sont en effet ordonnées autour de deux images fortes : les aliments d’une part (Myrtille sauvage plus, Goût cerise, Pêche-Ananas) et les ustensiles de ménage et de nettoyage (Fraîcheur citron, Dégraisse et tue les bactéries)…
On peine à comprendre le concept, si on n’avait eu les explications du jeune chien fou : « Dans toutes les fêtes, c’est dans la cuisine que se passe la vraie soirée. C’est le squat cuisine. Et le moment ultime, c’est quand on vide le frigo. Par terre, sur soi, sur les autres. C’est le food-fighting, qui associe violence et fun (on ne se lance que des bouts de gâteau, ce n’est pas bien grave). Et le lendemain, il faut nettoyer, avec du liquide vaisselle, de la poudre à récurer, etc. ». Voilà.

Mis à part l’aspect « occidentalement » débile de telles activités, leur retranscription sonore ne manque pas de piquant. Entre Jean Jacques Perrey et Super Discount, Olaf Hund s’amuse avec les sons électroniques colorés, les rythmiques endiablées, dans une course frénétique et saccadée qui évoque à la fois Super Mario Kart et des jingles de pubs radio 70’s (voir notre chronique de la compilation Pop-shopping). Easy listening survolté et trépidants beats syncopés se succèdent dans un mélange d’adrénaline bon enfant et de mélancolie de fin de soirée. Expressionniste et cinématique, la série Kitch kitch doit évoquer de bons souvenirs de décadence consumériste aux initiés, entre tartes à la crème et bulles de savons.

Le concept ne se limite pas à la retranscription sonore d’une débauche bien bourgeoise. Formellement, ces petites vignettes musicales, courtes et expéditives comme un vol de yaourt à travers la pièce, se présentent comme purs produits de consommation, au même titre que les objets qu’elles évoquent. Une musique à consommer avec modération cependant… pour les frais de blanchisserie.