Après avoir brillamment exploré la salsa 70’s et 80’s dans les légendaires compilations Nu Yorica Soul 1 & 2, Soul Jazz Records revient aux sources de la musique latine new-yorkaise avec Nu Yorica Roots. Ce CD dresse une carte musicale et chronologique du mythique Spanish Harlem, quartier de New York d’où émergea la crème de la musique latine entre 1950 et 1970. Portoricains et Cubains ont alors forgé un son unique à base de rythmes afro-cubains traditionnels, de jazz et de soul US.

Tout a commencé à la fin des années 1940 avec le Cubop, expression créée par Dizzy Gillespie pour désigner la fusion inédite des percussions afro-cubaines et du be-bop opérée dans un New York bouillonnant de musiques et brassant des cultures diverses. Un des exemples les plus réussis de latin-jazz est l’enregistrement réalisé par Sabu Martinez pour Blue Note, en compagnie du maître du hard-bop, Art Blakey. The Oracle est une fulgurance bop qui illustre le degré de virtuosité atteint par ces musiciens. Nu Yorica Roots ne pouvait évidemment pas parler de cet âge d’or sans évoquer le mambo et les Mambo Kings qui sévissaient dans les années 50 : Tito Rodrigues, Machito et Tito Puente (avec la version originale de Oye como va). Classique mais indispensable, à l’image du titre Druma Kuyi, rythme afro-cubain traditionnel interprété par Mongo Santamaria.

Nu Yorica Roots visite aussi avec érudition l’évolution soul et free engagée dès 1965 par la nouvelle génération de musiciens latinos nés aux Etats-Unis. Harvey Averne (The Word), Orchestra Harlow (Horsin’ up) ou Joe Bataan (The Riot) satisferont les amateurs de boogaloo et de latin-soul. La musique devient de plus en plus libre à mesure que la fin des années 60 approche. Ray Barreto signe avec Acid un des sommets du genre et Eddie Palmieri s’engage dans une voie résolument tournée vers le jazz modal et l’improvisation la plus débridée (My spiritual Indian).

Outre la superbe pochette de l’album, inspirée par une affiche de Izzy Sanabria, Nu Yorica Roots offre un livret richement annoté sur l’ensemble des styles musicaux défrichés par le CD. Seul bémol à cette excellente compilation, aucune référence discographique n’est donnée sur les enregistrements réunis, comme cela était pourtant pratiqué sur les deux Nu Yorica Soul.