Pour avoir déjà repéré son nom sur une flopée d’albums (Paris Jazz Big Band, dont il est le co-leader avec Pierre Bertrand, George Russell, Diana Krall, Dee Dee Bridgewater), entendu le son de sa trompette au sein de l’ONJ de Didier Levallet ou suivi avec (plus ou d’) enthousiasme ses frasques au sein du collectif NoJazz, on n’ignorait pas que Nicolas Folmer comptait parmi les plus prometteurs des jeunes musiciens français. A 27 ans, il se lance en leader dans cet album élégant et mesuré où, sans jouer l’esbroufe ni les acrobaties tape à l’oeil, il s’entoure d’une bande de pointures (André Ceccarelli, batterie ; Ira Coleman, basse ; Alfio Origlio, piano) pour propulser une musique bien ancrée dans la tradition, jusque dans les références mythologiques qui lui donnent son titre. Martial Solal ne s’est pas fait prier pour dire tout le bien qu’il en pensait dans les notes de pochette : « Un disque important, gravé par des musiciens importants. Rien de moins ». Folmer ne révolutionne pas l’histoire du jazz, mais son propos n’est pas là : s’approprier une tradition, s’y montrer à la hauteur d’aînés écoutés et révérés, donner forme à son propre imaginaire à travers neuf compositions originales et les transcender dans l’interprétation sont déjà un pari suffisant. A l’écoute, on est surtout frappé par la précision et la vélocité de son jeu de trompette, nerveux sans fébrilité (Le Phoenix), rond et envoûtant sans pesanteur ; servi par le drumming touffu du toujours parfait Ceccarelli, la basse souple de Coleman et le jeu discret et sobre d’ Origlio, il fait de ce coup d’essai une réussite, trouvant le juste équilibre entre les puissances invoquées en exergue : « la force de Spartacus et la volupté des Naïades, l’audace fatale d’Icare et les ressources initiales du Phoenix ». Les détonations du saxophone de Stéphane Guillaume (qui intervient aussi à la flûte) viennent pimenter un peu la sauce ici et là et lui confèrent le petit souffle d’emportement qui, sans lui, aurait sans doute manqué à l’album.