Stephanie Böhm de Mrs John Soda évoque tout d’abord ces chanteuses des années 80 qui ne le sont devenues que parce que leur homme était lassé de leur offrir des manteaux en vison -un disque c’est quand même autrement plus classieux et durable. Pour étayer ce propos, on se réfère au gros nom qui plane au dessus des compostions du groupe, cet allemand surdoué, un de ces musiciens à l’aise avec les guitares, doué pour les synthés, qui sait reconnaître et arranger une bonne chanson, Micha Acher le responsable en chef des disques des mieux connus Notwist.

Ce n’est pas que Stephanie Böhm chante mal, c’est juste que son petit filet de voix se glisse trop discrètement entre les lucioles synthétiques, qu’elle se fait trop souvent oublier derrière des rythmiques plus remarquables qu’elle, qu’enfin elle n’a pas la présence pleine de glace et de trouble de Valerie Trebeljahr, l’autre chanteuse attitrée de Micha Acher lorsque le nom du groupe est Lali Puna. Pourtant, il en faudrait de la présence parce que Mrs John Soda fait du rock, enfile les tubes, écrase la concurrence, apporte le changement. On connaît la base musicale de ce No P or D, les rythmes de Can, les synthés de Neu tels qu’ils sont été maintes fois repris par la cohorte Too Pure -Moonshake et Stereolab en tête- les synthés institutionnels de Kraftwerk et leur légion de fistons.

C’est toute une ribambelle d’emprunts au monde extérieur qui font sonner ce disque neuf -à commencer par ces riffs de guitares qui rappellent certains vieux moments rares et brillants de Sonic Youth, ces flûtes qui surlignent des bris de voix façon Loveless de My Bloody Valentine. Et puis c’est surtout cette énergie rock’n’roll, cette puissance mélodique qui ne relâche jamais la pression, le rythme endiablé voir chaotique avec lequel se déroulent 8 titres dont les fantastiques Misco et Go chack -singles parfaits et têtes de pont parfaites pour imposer le groupe à un public plus large. Quelque-chose d’assez universel transpire de ce premier album, comme si l’Allemagne musicale telle que nous l’illustre avec un bonheur constant le label Morr Music était cette fois-ci réellement partie à la conquête du monde, lentement, calmement sans presque y croire, à l’image de la chanteuse discrète de Mrs John Soda.