Echappé de nulle part ou plutôt de Bristol, Jesse D. Vernon a du écouter beaucoup de disques qui l’ennuyaient avant de se décider à enregistrer le sien. Avec My place in the dust, il a composé le disque qu’il aimerait écouter. A coup de mini-hommages à peine dissimulés, à Portishead qui sont des amis, au Velvet ou à Neil Young qui sont des idoles, cet ancien leader des Moonflowers, groupe informel n’ayant laissé qu’une trace très vague au pays du songwriting, retient maintenant l’attention, en servant un deuxième album solide, enregistré à l’ancienne, qui alterne les promenades en orgue et les chevauchées sur guitare saturées.

Très proche (vous souvenez-vous ?) de Richard Davis, Jesse D. Vernon se pose en compositeur obnubilé par la mélancolie, fortement marqué par la noirceur d’ambiances cinématographiques, aperçues chez Wim Wenders, appréciées chez Cassavettes. My place in the dust s’impose comme un excellent disque : des chansons toutes magnifiques qui font de l’ombre à tous les jeunots bavards apparus cette année (Ed Harcourt en tête). Il séduit surtout par ses rudes sonorités, brutes et poisseuses, qui en servant les mélodies avec une précision confondante, laissent deviner l’apport essentiel de John Parish.

Peut-être ce nom devrait-il être marqué sur la pochette tant son influence est manifeste. C’est lui sans doute qui par ses recettes de producteur permet à chaque chanson de révéler ses qualités mélodiques et son énergie saine et directe. Séduit par les chansons, après les avoir écoutés à l’état de brouillon, il a effectivement produit cet album, en mettant l’accent sur le grain des guitares, proche de ce qu’on peut entendre sur les derniers disques de PJ Harvey. Chez lui, la simplicité est érigée en règle d’art. Il faut que l’auditeur puisse entendre chaque son, en particulier les souffrances des cymbales malmenées.

Jesse D. Vernon a trouvé celui qui a su rendre son album essentiel. John Parish est un producteur intriguant qui a donné à ce nouveau blues dans lequel s’illustrent PJ Harvey, Sparklehorse, Tindersticks, Nick Cave et tant d’autres, des habits rustres, simples, mais dignes. Cet homme de l’ombre est une fois encore, celui qui permet à la musique de briller.