Nouvel album de Juan Atkins (pionnier de la techno de Detroit) sous le nom de Model 500, pseudo qu’il utilise pour ses productions plus mélodiques et plus chantées, en un mot : plus soul. Le dernier album sous ce nom datait de 1994 et était produit avec Moritz Von Oswald (aka Maurizio), d’où la connexion avec Berlin et le label Tresor (sur lequel Atkins a sorti récemment un album sous le pseudo Infiniti, plus orienté techno froide et minimaliste). Sous une pochette plutôt réussie (signée Designers Republic) qui montre son visage, ce disque sur le corps et l’esprit contient effectivement quelques morceaux qui se rapprochent de chansons : Rain, calme et tranquille, promène ses voix sur des quais détrempés, et Be brave illumine ces mêmes quais d’une petite guitare, d’une rythmique pleine d’espoir et d’une voix masculine particulièrement gutturale. Ce que pourraient être des morceaux R&B supportables, éventuellement.

A part ça, c’est electro et bleep à tous les étages. Et à propos d’electro, le dernier morceau du disque (It’s time) est une véritable bombe tout droite issue du Cybotron de 1982 (même vocoder, ligne de basse terrible, synthés ad hoc). Par contraste, le premier morceau est beaucoup plus moderne : l’electro de 1999 est plus inquiète, bourrée de signaux, de déchets et de sons interrompus. Le long Every day, très trip-hop bizarre (à la Tricky ?), ennuie un peu, surtout à cause de la voix, et ce malgré des nappes très réussies. Incredible, pas mal du tout, rappelle 4 Hero et surtout introduit un peu de mélancolie dans le disque. In and out effectue un retour bienvenu aux canons de la techno : rythmique solide sur ligne de basse gonflée et voix virile from outer space, on reconnaît bien là la patte Atkins. Tipsy reprend le même principe mais avec une voix : dommage, car elle n’apporte pas grand chose. Just maybe est un gros morceau de funk outrancier, quelque chose entre Prince, George Michael et Funkadelic. Étonnant. Mind and body, très étrange, ressemble à un morceau au ralenti, écho en plus, une sorte de dub malsain et précieux. En résumé, un album très hétéroclite, bariolé, qui surprend à la première écoute. On peut préférer le Juan Atkins plus strictement techno ou électronique, mais celui de Model 500, nettement plus pop, fait découvrir un aspect nouveau de son travail. Un patchwork parfois déstabilisant, toujours intéressant.