Attention, sous ses dehors de disque banal, ce merveilleusement titré Mastered by Guy at The Exchange (boutade qui prend un détail des crédits techniques -le mastering- et le flèche comme emblème) renferme des merveilles. Son précédent Some best friend you turned out to be, trop dense, trop rétif, avait déçu après l’incroyable déluge d’idées de son premier 12’’ (sorti en catimini il y a quelques années sur Warp, qui n’y a jamais donné suite), on n’attendait donc pas grand-chose de ce nouvel opus.

Mais dès la dixième seconde du trépidant Merman et ses tressaillements de synthé cheap, on dit qu’il se passe quelque chose de réellement pas normal. Le soleil brille, Ben Jacobs alias Max chantonne comme un vieux crooner défraîchi qui retrouve son souffle d’antan, sans raisons, gonflé à l’hélium, alors que derrière, son bontempi cassé entame des breaks dignes d’Elvin Jones. Mbgate, funk-jazz idiot, se mue vite en une irrésistible coulée princienne, blindée à rebord de variations passionnantes. Pas normal, on vous dit : le garçon s’est inventé un songwriting à lui, funky, syncopé, qui va à mille kilomètres à l’heures sans jamais donner le tourni. Electronica ? Connaît pas. Lysine, affolante pop song bourrée au gatorade, donne tout simplement envie d’aimer son prochain. Lights est un inédit de Timbaland passé deux fois trop vite et englué de du chamallow, Fuerte un exercice de déphasage exercice délicat comme les mélopées pour bébés de Raymond Scott qui se transforme vite en un B.O. de jeu de bisous sur Game Boy. Et, comme ça, ça ne s’arrête pour ainsi dire jamais, avec quelques surprises de taille (Cabasa ne démarre qu’après quatre minutes d’un ennuyeux simili groove binaire, pour déboucher sur une des plus belles outro entendu de longue date) histoire d’être vraiment sûr de ne jamais s’ennuyer.

Comme un meuble de cordonnier, avec ses mille tiroirs, ses milles trouvailles, ce disque pas sérieux emballe quasiment sans cesse, et atteint des sommets d’euphorie bizarroïde. C’est inattendu, et pourtant, ce deuxième album de Max Tundra est excellent, pas banal du tout, et absolument passionnant.