La distribution hexagonale par Abeille du label danois SteepleChase est une bénédiction pour les inconditionnels de Lee Konitz, dont nous sont arrivés en quelques semaines, outre ce passionnant duo avec le batteur Matt Wilson, un concert de 1974 avec le contrebassiste Red Mitchell sur des thèmes de Cole Porter (I concentrate on you) et, entre autres, un enregistrement de son quartet (Humair, Solal, Orsted-Pedersen) à Juan-les-Pins la même année (Jazz à Juan). Le goût du saxophoniste pour la formule du duo n’est pas neuf : si Paul Bley, Albert Mangelsdorff, Enrico Pieranunzi et nombre d’autres ont successivement croisé le fer avec lui, c’est cependant la première fois qu’il s’associe à un batteur (le « Gong » du titre, bien sûr, clin d’oeil à un film culte).

Treize improvisations, donc, dont n’ont été préalablement établis que les structures générales (Mark Gardner rappelle à cette occasion dans ses notes de pochette que Konitz participa, en 1949, au premières « unstructured performances to be put on the record » au sein du sextet de Lennie Tristano, Intuition et Digression) : l’inspiration mélodique de Konitz trouve dans les tambours et cymbales de Wilson un répondant stimulant et pertinent, explorant toute la palette des timbres et possibles de son (ses) instrument(s). Conversations, questions / réponses, méditations duelles (No ill wind), commentaires réciproques, fantaisies (Foxtrot) : le dialogue exige de l’auditeur une concentration soutenue, sauf à perdre le fil. Se laisser couler dans l’atmosphère sonore peu habituelle de ce duo de haut vol n’est toutefois pas nécessairement la plus mauvaise manière d’en profiter.