Du grand art et de l’émotion… ou comment remonter le cours de l’histoire des musiques populaires cubaines en compagnie d’une des plus vieilles et des plus célèbres fanfares de la province d’Oriente, contrée mythique s’il en est, d’où sont partis les premiers ébats du sone et de la trova. Fondée à la fin de la guerre d’indépendance par une poignée de musicos habiles, La Banda de Santiago, en plus d’aligner les prix et les consécrations, n’a jamais manqué de se renouveler, afin de mieux accompagner les différentes tendances musicales qui ont transporté Cuba durant ce siècle. De la composition intimiste aux rythmes les plus entraînants, de l’hymne national à la reprise de La petite cantate française signée Barbara (à l’origine), du style semi-militaire des débuts -théoriquement réservé aux attaques d’infanterie ou au défilé des grands jours- à l’air décontracté provoqué par les atmosphères de carnaval ou de concerts d’aujourd’hui, l’ambition est toujours la même… Séduire le public avec un répertoire national, qui demeure parmi l’un des plus fameux de ce monde.
A l’occasion de son centenaire (1898-1998), La Banda Municipale de Santiago s’est enfin décidée, sous la direction de son chef émérite, Castillo Peñalver, à marquer le coup par un premier disque, parfois teinté de nostalgie heureuse, où s’invitent dans un désordre intelligent quelques uns des joyaux du son cubain (El manisero de M. Simons est à savourer en pôle position, voir également le pot-pourri de P. Gomez, Cuba Puerto Rico, pour une ballade condensée). On suggérera -bien sûr- deux petites merveilles, entre autres surprises, pour les plus fanatiques. Le Chan chan de Francisco Repilado alias Compay Secundo, anciennement clarinettiste dans cette fanfare, actuellement peuplée par une quarantaine de musiciens. Ainsi que l’El Carabali de Felix Caignet, inspiré d’une contredanse venue de St-Domingue. Il va sans dire que Barbara aurait sans doute apprécié de voir « ces anges » déambuler avec « leurs trompettes » dans sa ruelle, si elle avait vécu… Bonne écoute.