Guimo est l’autre nom de Guillaume Hermon, bordelais d’origine, mais américain de profession… de foi. Car comme un nombre croissant de jeunes musiciens français, qui semblent considérer l’Amérique selon son sens mythologique de terre promise, Guimo s’inscrit dans une certaine tradition country-folk nord-américaine, de Lee Hazelwood à Calexico, un ensemble bien connu de guitares réverbérées, d’orgues chauds, de percussions exotiques, de mélodies en boucles, de langueur et de lenteur. Les chansons croonées de Guimo déclinent sur 12 titres aussi explicites que El Dorado, Kansas ou Geronimo, une musique de plein soleil, de milieu du désert, une certaine paresse contemplative, une invitation à enlever ses chaussures, et à marcher pieds nus dans le sable… Entouré de musiciens ayant joué avec lui depuis de nombreuses années mais aussi d’anciens membres de Kim, de Pull, de NUER ou des Oisillons tombés du nid, Guillaume Hermon susurre ses lentes litanies d’une voix fragile et quasi atonale, sur des guitares lointaines, des basses rustiques, des ambiances poisseuses. Les férus d’évidences pop en seront pour leurs frais, la musique de Guimo est intimiste et presque égoïste, mais sincère et authentique.

Bevel par contre, est un groupe américain pur jus. Le label bordelais Disques Mobile à pris en licence en France ce très bel album de Via Nuon, song-writer vu et entendu chez Drunk ou Manishevitz. Co-produit, enregistré et mixé par Michael Krassner (Boxhead Ensemble, Lofty Pillars et Simon Joyner), Where leaves block the sun rassemble certains des meilleurs musiciens de Chicago, que ce soient Fred Lonberg-Holm (Peter Brotzmann, Tentent, John Zorn et Light Box Orchestra), Ryan Hembrey (Edith Frost, Shannon Wright et Pinetop Seven), Jason Adasiewicz (Central Falls), Deanna Varagona (Lambchop), Mick Turner (The Dirty Three, Bonnie Prince Billie, Bonnevill), Jessica Billey (Bonnevill) et Scott Tuma (Souled American), jouant ensemble sous le nom du Council of Rousseau, allégeance lettrée à une culture européenne à laquelle s’abreuve Via Nuon, tête pensante de Bevel. Tout ce beau monde se retrouve sur une musique folk douce et complexe, jamais très éloignée du plus beau psychédélisme, celui très simple par exemple d’un bâton de pluie sur une montée d’orgues dans Once a pond, un psychédélisme de proximité : acoustique, boisé, convivial. Entre arpèges mineurs, violons subtils, pianos sporadiques, percussions concrètes, le chant de Via Nuon est touchant d’imprécision, entre Mayo Thompson et Tom Rapp. Le disque apporte son lot de réelles belles surprises : une double voix féminine ici, des inserts de cuivres là, quelques notes de Casio, un drone, un silence… Un disque inventif, qui se bonifie à l’écoute, passionnant.