Demeuré dans l’ombre durant une dizaine d’années, Greg Brown commence tout juste à s’imposer aux yeux d’un public encore trop restreint, comme l’un des plus remarquables auteur-compositeurs américains de sa génération. Son univers éminemment poétique, sa musique dépouillée (le terme « nue » serait plus approprié) sont sans équivalent sur la scène folk. A l’égal des plus grands (Tim Buckley, Nick Drake), il se dégage une alchimie particulière de ses chansons où la qualité littéraire et l’intelligence des paroles (le plus souvent des diatribes contre la société américaine) sont associées à sa voix grave et vibrante, restituant une intensité émotionnelle fascinante. Ce Slant 6 mind, nouvel opus sorti en catimini, est là pour le prouver. Prenons pour exemple l’excellent Spring & All sur lequel toute la richesse de son talent s’exprime sur quelques notes de guitare et en quelques mots d’une justesse impressionnante. Il en est ainsi d’à peu près tous les titres figurant sur cet album hors des modes et évoquant avec une économie de moyens singulière de petites choses universelles : l’amour, la destruction etc. Grand fan de Greg Brown, Leonard Cohen pourrait bien aller puiser son inspiration chez ce troubadour des temps modernes.