On ne présente plus Dr John, le pépère chtarbé du blues, avec sa grande barbe et ses doigts de fée. Plus de quarante ans de bons et déloyaux services, pour et avec les plus connus des plus connus (Clapton, BB King…). La surprise sur ce nouvel album, Anutha zone, c’est de voir que la production a été confiée à John Leckie, plus habitué à triturer la console pour les groupes de jeunes pour les jeunes (The Verve ou Radiohead). La où on commence à halluciner, c’est lorsque l’on voit la liste des collaborations : Spiritualized, Paul Weller, Supergrass, plus des membres de Portishead, Primal Scream ou The Beta Band (surveillez ces derniers, ils ont sortis deux singles qui ont mis la très perfide Albion en émoi, et sont censés bosse sur un album). Si c’est pas une cure de rajeunissement, ça…

Revenons au corps du délit, et disons tout de suite -ouf !- que l’on retrouve la patte du monsieur, des influences blues très roots bien entendu, le jazz et les voix blacks -splendide John gris– alliés à sa gouaille naturelle. Du coup, l’album, qui joue dans le contraste cru/sophistiqué, prend parfois des intonations vaudou. On sent chez ce type la très grande maîtrise et les idées bien arrêtées -en ce sens, il est rapprochable, même si le style n’a rien à voir, d’un autre barbu légendaire, Robert Wyatt.

Les moments de pur bonheur abondent –Anutha zone, The olive tree, The stroke, Ki ya gris gris– et on oublie totalement -si ce n’était la voix- que l’on écoute le disque d’un monsieur qui approche la soixantaine. Chapeau bas.