On avait déjà eu la surprise de retrouver pour Chat noir, chat blanc un Kusturica plus ouvertement burlesque que par le passé, même si cette drôlerie passait comme d’habitude par une espèce de baroque tzigane. Un Kusturica moins ouvertement politique également, même si les allusions étaient légion dans le film. Mais ce qu’on n’attendait pas, c’est de ne pas retrouver au générique Goran Bregovic pour la musique du film. Peut-être faut-il y voir la conjonction de deux faits : d’une part, la volonté de Kusturica de travailler avec le groupe No Smoking, son ancien groupe de rock et les potes de toujours ; de l’autre le succès international de Bregovic, forcément accaparant.

Bien sûr, de rock, il n’est pas toujours question dans cette bande-son ; la musique d’inspiration gitane reste à l’honneur, comme sur Bubumara ou avec Duj Sandale, en version trash-guinguette. Néanmoins, des sonorités plus modernes -comprenez notamment des parties de claviers- se donnent à entendre. Il y a aussi les influences cubaines, jazz, etc., pour un résultat assez patchwork, que Kusturica nomme lui-même « une world music impossible à identifier précisément ». Nous, plus simplement, on prend toujours autant de plaisir à écouter cette musique, sans se soucier si elle est authentique ou pas -notamment l’hilarant Daddy, don’t ever die on a friday. Et comme Kusturica a souvent les bons mots pour défendre ses choix, on terminera en le citant à nouveau : « Pour la musique de Chat noir, chat blanc, je voulais montrer à quel point la musique gitane n’a besoin de personne pour vivre sa vie. »