C’est finalement sous la forme d’un double CD réservé au marché japonais que sort le projet de remixes de Blur, dont on nous serinait depuis des mois. En fait, le premier CD accueille neufs remixes, le second abritant six titres live enregistrés chez Sir John Peel. C’est William Orbit qui se taille la part du lion pour ce qui est des morceaux retravaillés, avec quatre titres –Moving on, On your own et Death of a party en deux services. Mais les autres remixeurs invités sont loin d’être de parfaits inconnus : Adrian Sherwood (monsieur On-U-Sound), Moby, Thurston Moore (Sonic Youth) et John McEntire (Tortoise). L’ami Damon Albarn ne s’est pas refusé grand chose.
Bien sûr, il y a toujours quelque chose de périlleux dans cet exercice, mais dans l’ensemble, les relectures proposées sont intéressantes : Sherwood plonge Death of a party en plein sound system, et ça fonctionne très bien. William Orbit donne un On your own (crouch end broadway mix) junglelisé mais encore très rock, et même assez kitsch. On attendait un petit peu Moby au tournant, lui qui est capable du meilleur comme du pire. Bonne pioche, son Beetlebum est étiré, assez sobre, un poil mélancolique, et du coup franchement plus accrocheur que lorsque Moby essaie de donner dans le rentre-dedans. Le meilleur remix -et de loin- nous est offert par un John McEntire en grande forme, qui transforme Theme from retro en bossa-dub néo-futuriste, entre beats pointus et ligne claire : le morceau en devient tout bonnement extraordinaire. D’un côté, on peut sentir un intense travail d’appropriation sans jamais donner l’impression de besogner en triturant les sons à l’extrême ; c’est très impressionnant. Beaucoup plus en tout cas que le Essex dogs confié à Thurston Moore, nettement trop décousu et sans ligne directrice. On terminera en mettant en avant le fait que dans la plupart des cas, la voix de Damon Albarn a été conservée, ce qui ne rendait pas la tache plus aisée, et va à l’encontre de la tendance actuelle dans le mix, mais pourquoi pas…

Les six titres enregistrés live en mai 1997 chez John Peel –Popscene, Song 2, On your own, Chinese bombs, Moving on, M.O.R.– rendent grâce à l’énergie du groupe sur scène, et confirment l’option pour un son un peu plus dur que par le passé. Les guitares crissent, la saccade prédomine, le son est sale, c’est un peu comme si Damon Albarn partait à la recherche du son punk d’il y a vingt ans –Chinese bombs, en particulier, en témoigne. Peut-être veut-il aussi mettre fin à la réputation de groupe un peu trop poli dont Blur a été affublé depuis toujours. Qui s’en plaindra ?