Ben’s Symphonic Orchestra est le pseudo easy-listening-70’s de Benoit Rault, multi-instrumentiste parisien, remarqué dans les années 90 au sein du groupe indé Bel Air, plus connu désormais sous ce nouveau nom à tiroir (comme sa musique) depuis un premier album Junk shop bordélique et beckien, poussé par les anglais de Warner Chappell. Son dernier-né, Drifting, sur le label Microbe (Fabio Viscogliodi, Morning Star, Kim Fowley) transforme l’essai d’une pop française ambitieuse et en anglais, à visée internationale et hors-fratrie versaillaise (Daft, Air et consorts), donc plus orientée Europe et Japon, naturellement, que grand public US : une certaine vision de l’indépendance, honnête et exigeante, artisanale et autogérée. Les attributs du label autant que de ses artistes. Beau travail.

En résulte un album personnel et collectif : Drifting, construit seul et à plusieurs, faits de morceaux épars et bels et bien réunis. Invitant son frère Lionel (aka Flairs, auteur récent d’un single electro amusant), Fabio Viscogliosi (Married Monket et en solo), Mr Neveu ou les frères Laureau (Prohibited Records, nlf3), ce nouvel album enfile autant les diversités musiciennes que les influences musicales variées : la pop sophistiquée de Neil Hannon, le funk de bric et de Beck (Nowhere land), l’emphase mélodieuse de Leonard Cohen, les choeurs et le coeur des Beach Boys, le psychédélisme électronique de Joe Meek, en vrac. Drifting est donc éclectique et ambitieux, renouvelant l’écoute et la curiosité en subtiles variations, passant de la beatbox en avant du tubesque Girl I miss you, au xylophone juvénile de From Hull to Hawaï (belle chanson sous influence Married Monk-Fabio), du long instrumental psychédélique Folk is dead au très Hazlewoddien et country (comme son nom l’indique) Bring me back to my country.

Quelques titres (Old lady, Drifting, Bring me back to my country) émergent ainsi d’un disque ouvert (éclaté ?) et aventureux, quoique restant toujours fidèle aux limites du(des) genre(s). On regrettera aussi parfois un certain maniérisme vocal qui rend le chant artificiel ou par trop connoté. Mais la réelle nouveauté, et non des moindres, qu’apporte cet album, est une vision exigeante du travail de production, faisant fi des complexes afférents à une scène française morose et donnant plus que jamais confiance en l’avenir d’une certaine production indé. Ce disque sonne. A l’heure de la vulgarisation des qualités sonores pourries, Benoît Rault oppose une oreille exigeante. En interview, il m’a demandé : « Tu as déjà été à une soirée où la musique était en MP3s et provenait d’un ordinateur ? Moi j’ai l’impression de ne rien entendre, et je ne peux pas danser là-dessus. ». Ecoutez son disque, pour vous faire une idée.