Ce qui frappe en premier lieu chez 310, plus que la musique, c’est l’ambiance qu’elle conduit. Le duo américain nous ramène au meilleur de l’épopée ambient, au début des années 90, vers des groupes comme The Future Sound Of London. Pas une musique d’ambiance, une musiques d’ambiances, qui captive d’un tour de patte l’attention, obnubile les sens, devient obsession. Une musique bercée d’effets analogiques et de voix lointaines, qui suggèrent des histoires, des rêves, mais jamais ne nous les imposent. After all est le quatrième album de 310, un duo bien particulier : Tom Donavan, ingénieur du son dont la patte est appréciée d’A Tribe Called Quest aux Roots en passant par Birtney Spears, réside à New York. Joseph Dierker, lui, a délaissé la Big Apple pour Seattle. Et le groupe travaille par voie postale, s’envoyant et modifiant tour à tour les esquisses sonores de l’autre.

Après les premiers LP Aug 56 et Snokelhouse, les Eps NOD et Prague Rock (parodie élaborée à partir de samples de rock progressif 70’s), les américains sont désormais secondés par le chanteur Andrew Sigler (le morceau After all). Ils poursuivent ici les travaux amorcés avec leur troisième album The Dirty rope. Une musique qui s’éprend de sonorités concrètes du quotidien, qui effleure tous les styles sans jamais s’inscrire dans un particulier. Une gare, un train à l’arrivée, ou au départ, des craquèlements, un arpège de guitare mélancolique, le morceau d’ouverture Takamous pose les bases d’un disque qui explore les sentiments et les souvenirs. An seanachi est traversé d’une émulation nostalgique, The Claw is forming et Street level, construits sur des sons atmosphériques, élèvent et rassurent . Ailleurs, ce sera l’inquiétude de résidus de jazz véhéments (UNTidal et Truce for a moment ), de fantômes de voix (Aural axciter) accompagnés de rythmes break-beats et de sonorités ethniques, indiennes ou orientales

Ecouter After all, c’est alors parcourir les pages d’un livre qui, les unes après les autres, nous enivrent d’univers singuliers. Une musique élaborée à partir de collages, d’emprunts, d’allusions, d’intrusions dans des mondes familiers, une musique qui trifouille notre subconscient, réveille des images, des sons, des parfums engloutis. La peur à côté, des leurres d’espoir à proximité, la délivrance enfin, After all est un disque introspectif dont chacun possède l’explication.