Pierre Mac Orlan ne fut pas ce que l’on appelle communément un homme de lettres. Il était mieux éduqué et plus poli que cela. En revanche, ce fut un bavardeur infatigable. Son œuvre abondante, sans être jamais lassante, le prouve. Et ce Petit manuel du parfait aventurier, un livre à mettre entre toutes les mains des baroudeurs en herbe, fait encore nos délices. Depuis sa parution en 1920, c’est en effet le type d’ouvrage qui circule de génération en génération sans donner de signes de faiblesse. Cette délectation est assez simple à comprendre : nous avons affaire à un maître-livre. Son auteur y réinvente l’aventure, dont chacun sait qu’elle n’existe pas. Il restait à le confirmer. Cet écrit s’y emploie : « Un homme de qualité, quand il aime l’aventure, ne parle jamais de ce qu’il a vu. Un aventurier passif de bon goût garde en lui-même ce qu’il a vu, par pudeur. » La grande idée est donc que le véritable aventurier est passif. Il y participe essentiellement par l’imagination. On s’en doutait. François Villon ou Marcel Schwob, qui sont des maîtres du genre, et jetaient déjà où bon leur semblait, mais en bon ordre, l’encre sur le papier, l’avaient dit. Enfin, Mac Orlan est un rêveur qui inspire toujours confiance. Qu’il fut un pantouflard aux horizons illimités ne change rien à l’amitié qu’on lui porte. La saveur de ce court texte est relevée : l’esprit y circule librement. Et sans faiblir.