Pour la première fois, une traduction de La Vie solitaire s’offre à nous, lecteurs modernes qui ne lisons pas Pétrarque dans le texte et qui sommes de moins en moins enclins à la vie solitaire et à la méditation des jours durant. Comme retour aux sources, on ne peut pas faire mieux. Adieu les thérapies de groupe entre collègues pour expulser les tensions, les engouements pseudo-zeno-secto-macro-bio. Pétrarque nous rappelle à la raison, nous réconcilie avec le silence et donc avec nous-mêmes. Il nous trace le chemin le plus court pour accéder à la plénitude et nous rappelle que solitude ne rime pas avec dépression à tendance maniaco-dépressive. Il nous brosse un portrait absolument idyllique d’un homme qui renonce aux futilités et tentations vaines, et qui tend, par conséquent, à atteindre une sorte de perfection intellectuelle et morale.

Au-delà d’une belle dissertation sur la solitude et sur les vertus de l’isolement, Pétrarque se dévoile dans ses convictions les plus intimes, dans certaines petites contradictions qu’il reconnaît en lui-même. Il pèse le pour et le contre, démontrant non sans une certaine subtilité l’absurdité de l’homme affairé qui court après une reconnaissance et rencontre successivement la déception, la vacuité et la complaisance. L’homme solitaire ne connaît pas ces désillusions, l’examen de son âme et l’épreuve qu’il s’impose ne peuvent que le combler. Sans prôner une vie ascétique et austère, Pétrarque défend l’idée d’une recherche spirituelle et intellectuelle proprement individuelle et tente de démontrer que l’isolement n’exclut pas l’exercice de l’amitié. Il entend défendre son propre choix de vie en « s’exilant » à Vaucluse en 1337, il explique cette retraite en faisant référence à une multitude de personnages bibliques ou historiques, tels Moïse ou Abraham, Ambroise, Augustin et Grégoire ou encore Sénèque et Cicéron, qui se sont imposés cette discipline et ont apprivoisé le Temps de manière à mieux le maîtriser. Un témoignage unique sur l’auteur et une invitation à passer quelques soirées en compagnie de… La Vie solitaire.