Face à la morosité de la plupart des romans de la rentrée -où « côté contenu, la violence et le sexe dominent », annonçait laconiquement Livres hebdo en juin dernier-, le roman historique apparaît comme une valeur refuge. C’est en tout cas le raisonnement qu’ont fait les membres de l’Académie française et les jurés du Goncourt en couronnant La bataille de Patrick Rambaud. Les critiques de ceux qui jugeaient trop peu romanesque cette reconstitution du déroulement de la bataille d’Essling, qui opposa la Grande armée aux Autrichiens de l’archiduc Charles près du Danube, les 21 et 22 mai 1809, n’y ont rien fait. Ce roman a séduit par sa vivacité et son humour.
Polygraphe réputé pour ses pastiches, Patrick Rambaud s’est visiblement beaucoup amusé à mettre en scène l’Empereur, les officiers de la Grande armée, les grenadiers anonymes et Stendhal, à qui il a inventé pour l’occasion une suite d’amours malheureuses. Le futur auteur de La chartreuse de Parme n’en vit pas plus à Essling que Fabrice à Waterloo, et Rambaud fait de ses déboires sentimentaux un des fils conducteurs de son livre. L’autre fil est attaché au baron Lejeune, qui fut l’un des peintres de l’Empire.
Essling ne pouvait que retenir l’attention de cet observateur attentif. Pour la première fois, la Grande armée ébranlée par ses déconvenues espagnoles tremblait sur ses bases : 16 000 Français tombèrent en tentant de résister aux assauts des 90 000 soldats de l’archiduc, qui perdit 27 000 hommes en une trentaine d’heures. Les campagnes napoléoniennes touchaient là un tournant. C’est de ce tournant que Patrick Rambaud a voulu écrire le roman.