Publiée en 1990, cette anthologie-manifeste du Groupe 13, fondé à Bologne par Loriano Macchiavelli, Carlo Lucarelli et Gianni Materazzo, et composé de dix autres auteurs débutants ou confirmés, tel Pino Caccuci, a signé le renouveau du polar italien. Leur ambition d’écriture répond à la déclaration de Lucarelli : « La vieille littérature n’a plus les instruments adaptés pour décrire la réalité. Maintenant la réalité est noire ». La revendication est claire et efficacement menée, et ce recueil règle son compte à la trinité caricaturale transalpine : les familles se déchirent, les pâtes sont trop cuites et Dieu s’en fout. Chaque nouvelle est une variation sensible et ténébreuse, drôle ou amère, qui touche la réalité en plein cœur. Instantanés pris sur le vif du quotidien, faits divers ou pages d’Histoire, ces textes nous précipitent dans la noirceur de secrets intimes, sociaux ou politiques.
Le crime apparaît comme un basculement fatal dans la complexité du réel, une mise en pièces des certitudes et des espérances. Il renvoie chacun des personnages à sa solitude. Criminels, ils ne le sont pas forcément au sens juridique, mais parce qu’ils sont surpris en flagrant délit d’existence, en pleine évasion des visions conventionnelles et des interprétations prescrites. Cambrioleur sensuel ou ancien partisan, vieillard amoureux et nostalgique ou flic rongé par le remords, tous sont liés par une solidarité tragique.
Cette anthologie est la première escale d’une traversée du polar méditerranéen proposée par les jeunes éditions Tram’. La publication de romans de Marcello Fois, Eraldo Baldini et Giampiero Rigosi, écrivains du Groupe 13, est prévue pour 1999. Au mois d’avril, des signatures et des débats, en présence des auteurs, auront lieu dans plusieurs librairies parisiennes.