Lorsqu’il ne pose pas pour des magazines de midinettes en compagnie de ses amis Nicolas Bourriaud et Jean-Yves Jouannais, du collectif Perpendiculaire, ou qu’il n’anime pas, toujours avec les mêmes, des tables rondes sous le feu des projecteurs de la télévision, Christophe Duchatelet fait œuvre de fabuliste. Son premier « roman », le bien nommé Le Stage agricole, est là pour nous le rappeler.

La malice est au rendez-vous de ce conte (décidément, comment qualifier ce livre qui se dérobe à toutes les catégories en vigueur) placé sous la tutelle d’Orwell, pour la représentation des animaux -dégénérés au demeurant-, et de Kafka, pour le malaise entretenu tout du long. Influencé par ces deux auteurs, Christophe Duchatelet opère une synthèse séduisante de la dénonciation du totalitarisme soft que constitue l’ère technique. Car « parmi le vaste univers des machines enfantées par l’humain, la Réussite cohabite avec l’Horreur, la Providence avec le Malheur. » Maurice, principal protagoniste de cette histoire, en sait quelque chose. Egaré avec deux acolytes sur les routes d’un territoire non identifié, il se retrouve pris en otage dans un curieux village où il doit impérativement, c’est-à-dire sous le joug de paysans vicelards, s’initier aux travaux des champs. En dépit de son esprit de résistance, il ne pourra pas s’extraire de ce bled, et la farce ne prendra fin que dans un chaos général.

Qu’importe si la vulgarité retranscrite par l’auteur ne provoque pas toujours les effets désirés. Ne boudons pas notre plaisir. Voici le livre le plus drolatique de la rentrée.