Amputé de sa prestigieuse licence pour de mystérieuses raisons -un désaveu tardif, peut-être ?- le titre de World racing provoque un étrange sentiment de jeu de bagnoles passe-partout. Pourtant, qu’on ne s’y trompe pas, le jeu de Synetic est une ode exclusive aux productions de la marque Mercedes-Benz. Une avalanche de mercos et rien d’autre, on frôlerait presque le concept-game. Malheureusement, la particularité du titre s’arrête là. En dehors de sa monomanie quasi obsessionnelle pour le constructeur pré-cité, World racing ne propose rien de bien neuf dans l’univers bien calibré de la course automobile, avec son gameplay penchant indubitablement plus du côté de la simulation made in Gran turismo 3 que de la décontraction arcade. Bien que les développeurs aient eu la bonne idée d’ajouter une option permettant de doser le degré de réalisme du pilotage, on ne conduit pas ici de simples caisses en aluminium allégé, comme peut le faire ressentir le très propre sur lui Racing evoluzione. Ici, on pilote du lourd, de la bonne grosse allemande avec moteur physique pointu, une véritable adhérence au sol, des sensations de transferts de masse, etc. Plongé dans la peau d’un pilote d’essai Mercedes qui doit gravir petit à petit les échelons et les championnats les plus divers, l’amateur de mécaniques devrait apprécier le travail des développeurs pour retranscrire les petites subtilités qui différencient les modèles de la marques. Les béotiens, quant à eux, risquent d’être un peu perdus dans la masse d’informations et de véhicules. Surtout, ceux-ci finiront peut-être par s’ennuyer ferme au bout de deux ou trois championnats. Si World racing propose effectivement quelques « missions » ayant le mérite de varier un tant soit peu les plaisirs -notamment des courses de 4×4 plutôt originales-, il finit irrémédiablement par tourner en rond. C’est pointu, certes, mais le jeu pêche par manque de dynamisme, entre courses longuettes et pas toujours passionnantes, IA minimale et progression un peu absconse à base de pourcentages notant les moindres caractéristiques du pilote -classements, expérience, discipline, etc. C’est l’éternel dilemme du jeu de course, coincé entre une approche dilettante mais fun et une optique plus réaliste mais soporifique. Et on n’a pas l’impression qu’il soit sur le point d’être résolu…

D’autant plus ennuyeux que World racing souffre de quelques carences de réalisation qui ne l’aident vraiment pas à faire la nique au bijou de Polyphony Digital. On passera rapidement sur l’interface des menus, incroyablement mal foutus. D’un point de vue graphique, par contre, la pilule est plus difficile à avaler. Là, c’est sûr, en comparaison, Racing evoluzione brille de toute sa classe et de son esthétique flamboyante. Entre les ciels oranges vifs, l’herbe jaune pisseux, certaines textures brouillonnes, des voitures trop lisses pour être honnêtes, des effets complètement ratés -notamment cette épaisse et inexplicable fumée qui se dégage des pneus des adversaires en temps de pluie, donnant l’impression de poursuivre des voitures en feu et réduisant la visibilité de la piste à zéro-, World racing donne parfois l’impression d’avoir été désigné par des daltoniens. Sans parler des petites « fantaisies » -soucoupes volantes, carcasses de dinosaures- qui font parfois des apparitions aussi incongrues que déplacées sur les parcours. Les graphistes ont du s’emmêler les pinceaux entre WipEout-like et simulation automobile… Dommage, parce que lorsqu’il se décide à donner dans la sobriété, le titre de Synetic ne s’en sort pas si mal : joli bump-mapping sur les pistes, beaucoup d’animations dans les décors, trop, peut-être, le moteur ayant quelque fois la plus grande peine à afficher toutes ces babioles sans ramer sévère dans les virages.

Titre sympathique pour les amoureux de la mécanique et de la marque Mercedes-Benz, World racing accumule bien trop les loupés pour pouvoir prétendre rehausser le niveau d’une logithèque automobile pourtant bien fournie sur la machine de Microsoft. Ca n’est pas faute d’essayer, et si la Xbox propose un large choix, du rallye à la conduite urbaine, en passant par l’arcade et le Gran turismo-like, il lui manque encore et toujours l’incontournable jeu de bagnoles qui jetterait aux oubliettes une pléthore de titres honorables mais inaboutis.