Autant être franc, on n’était pas spécialement enthousiaste à l’idée de tester Une Faim de loup. Avec ce qui s’annonce comme hits potentiels d’ici la fin de l’année, on attendait quelque chose de plus consistant à se mettre sous la dent. On avait tort. D’autant qu’Infogrames était déjà parvenu à adapter intelligemment un dessin animé avec Les Fous du volant. Ici, tout part d’un cartoon de Chuck Jones, génie méconnu injustement écrasé par l’ombre du grand Tex, dans lequel un cousin-clone du célèbre Vil Coyote, Ralph le loup, tente désespérément de chaparder une brebis à Sam, un chien de garde débonnaire mais infaillible. Petite infidélité au D.A. original, dans Une Faim de loup, cette partie de cache-cache s’inscrit dans le cadre d’un jeu télévisé présenté par l’ineffable Daffy Duck.

Ralph devra à chaque niveau subtiliser un mouton et le ramener à un endroit bien précis. Petite subtilité qui a son importance -surtout dans les niveaux ultérieurs méga-complexoïdes-, Ralph devra lui aussi être présent dans cette zone pour valider la partie. Oubliez le lancer de mouton, la tâche est beaucoup moins brutale, plus cérébrale. Première partie : kidnapper le mouton. En clair, la phase à la « Metal gear solid » : Ralph va devoir redoubler d’ingéniosité pour passer inaperçu. Dès qu’il pénètre le champ de vision de Sam, une icône représentant la tête du chien de berger indique la direction vers laquelle il projette son regard. Obligation non seulement de ne faire aucun bruit –une touche « mode furtif », comme pour MGS-, mais aussi de se fondre dans le décor. Soit plonger dans un arbuste, sautiller de rocher en rocher, voire se déguiser en mouton. Une fois la phase 1 arrivée à terme, il faut enclencher la phase 2 : ramener la boule de laine à la base. Une phase plus Lemmings-style, le mouton en question étant passablement crétin et amorphe. On peut évidemment le porter, mais il faudra parfois l’attirer et préparer le terrain pour lui éviter de tomber dans les pièges tordus tendus par les concepteurs du jeu.

Une batterie de gadgets estampillée ACME se révèlera donc nécessaire pour que Ralph parvienne à ses fins. De l’élastique géant à la roquette, en passant par les mines anti-personnelles et les ombrelles-parachutes, chaque objet doit être utilisé au bon moment et à bon escient. Les premiers niveaux sont heureusement plutôt didactiques et explicatifs. Mais très vite, la difficulté augmente et le jeu finit par frôler parfois la démence absolue. C’est un peu le lot du genre action-réflexion, il faut parfois faire preuve d’une grande, d’une très grande patience. Et avoir des nerfs en acier. D’autant que, petite ombre au tableau idyllique, la maniabilité du personnage et la gestion de la caméra sont un peu bancales. Rien à redire au niveau réalisation par contre, procédé cell-shading particulièrement appropriée aux capacités limitées de la PlayStation 1 et animation impeccable. Un vrai de vrai cartoon interactif –sorry pour le cliché.

On peut faire la fine bouche sur quelques menus détails, mais le genre action-réflexion étant un peu tombé en désuétude, Une Faim de loup comble indubitablement un manque pour les amateurs de torture mentale vidéoludique. Et c’est souvent franchement hilarant, ce qui ne gâche rien…