Bizarrement ce jeu est passé inaperçu. Le sujet plutôt « politiquement incorrect » selon les ligues de « vertu » n’a pas eu l’air de braquer grand nombre de censeurs contre lui. L’action se passe pendant la Seconde Guerre mondiale, en plein conflit idéologique. D’un côté l’amicale capitaliste, de l’autre l’horreur fasciste. Jusqu’ici rien de bien moralement dangereux pourtant. A son époque, Wolfenstein 3D pour un décorum pareillement marqué du svastika hitlérien s’était vu attiré la foudre de la consciencieuse pudeur occidentale. Le jeu ne devant pas entrer en contact direct avec la réalité horriblement historique… MOH, lui, à ce niveau-là, ne fait pas dans la dentelle. Il saute de plain-pied dans la monstruosité humaine, mélangeant, avec un certain génie marketing (tout comme Hidden and dangerous), l’archive passéiste à la fiction ludique la plus jouissive. Ambiance dès la présentation : « film d’époque », qui vous replace pédagogiquement dans le contexte. Après cet habile petit lavage de cerveau, rien ne vous semblera plus normal que d’aller zigouiller du boche. Terriblement plus excitant que de décaniller de l’extraterrestre (Duke nukem) ou du monstro-robot génétique (Quake). Le bonhomme visé avec le fusil à lunette est effectivement plus terrifiant et réussi que le plus horrible des monstres sorti de l’imaginaire dépravé d’un quelconque designer.

Au début de chaque mission (voler des plans, rejoindre le maquis, détruire les armes secrètes…), on vous rencarde sur le meilleur moyen de ne pas crever, sur les détails sehr important obtenus par les Renseignements et même sur les planques d’armes de la Résistance… Pour une fois vous avez intérêt à être un soldat discipliné si vous voulez avoir une chance de ne pas vous faire faire sauter le caisson par les Allemands. On le découvre assez vite : il se trouve que l’ennemi a eu l’intelligence de ne pas être bête. Leurs réactions sont on ne peut plus réalistes. Il suffit de lancer une grenade près d’un petit groupe adverse pour voir l’un des types courir vers elle, donner un coup de pied dedans alors que les autres vont se planquer sehr schnell (« dare-dare »). Mais les réflexes dépendent aussi de la situation. Si le soldat est assez près, il vous renvoie à la main le cadeau explosif. Reste à le shooter avant qu’il ait pu lancer sa « patate » (nom des grenades à manche allemandes), la brûlure du pruneau risque fort de lui faire lâcher son joujou et de le faire disparaître dans un nuage de gravats. Encore mieux : si un officier se promène avec son escorte, celle-ci se sacrifie, au cas où vous auriez eu la bonne idée de grenader le chemin, se jetant, en kamikaze, à plat ventre sur la bombinette pour couvrir les officiers. Bref… c’est malheureux, mais on y croit !
Le fait de ne pas être obligé de foncer dans le tas et de devoir défourailler l’armée allemande dans une Blitz Krieg jusqu’à Berlin pour mettre la fessée au Petit Homme à Moustache renforce encore cette impression d’horreur réaliste. Vos actes de guerre doivent être prémédités et la meilleure arme à cet égard restera toujours le fusil à lunette. Ne craignez pas la pénurie : entre les différentes mitrailleuses (posées au sol, dans les bunkers, elles vous permettent de tailler une route nécrophage à travers les champs d’Allemands), les fusils, les grenades, les bazookas et les flingues, votre armurerie a de quoi faire pâlir le milicien de base.

Mais le plus fort reste sans aucun doute l’ambiance sonore, digne d’un certain soldat Ryan. Le hurlement des balles à vos oreilles, les cris qui accompagnent votre lancer de grenade sont réellement effrayants de vérité. Dans les souterrains, vos pas rythmés par les gouttes d’eau suintant des parois sont forcément hésitants lorsque vous entendez des coups de sifflets accompagné d’un « il n’a aukune chansse de z’en zortir »… Bizarrement vous êtes le premier à le croire. Heureusement, vous retrouvez vos sens quand des pas de courses résonnent dans ces tunnels sans fin, la peur au ventre vous repartez de plus belle… Pour ceux qui ne supportent pas le côté shootautomatique des Doom-like, il y a de quoi se régaler avec Medal of honor, petit mélange savant de massacres bourrins et de réflexion-stratégie (certaines missions ne s’exécutent qu’avec un flingue et de faux papiers…). Le petit plus constitue bien sûr le mode deux joueurs, certes un peu plus lent, mais la vitesse n’est pas forcément le premier critère du plaisir…