Nouvelle tranche de vie du gars Threepwood au pays de la flibuste : le pirate ingénu, éternellement en devenir disons, vient de passer la plus formidable des lunes de miel avec sa belle, Elaine Marley, gouverneur de l’île de Mêlée. Parfait. Sauf que de retour sur l’île, nos tourtereaux en apprennent une bien bonne : Elaine a été déclarée morte. Pourquoi, comment ? Mystère. En attendant de connaître le fin mot de l’histoire et de savoir ce qui se trame de louche au pays des boucaniers ravagés, le couple constate, effaré, qu’il est question de détruire sur-le-champ la demeure d’Elaine à la catapulte. Première véritable mission : stopper le carnage. Pour ce faire, il s’agit d’appâter le lascar chargé de faire le sale travail en lui offrant quelques bretzels fourrés à la cervelle. Pendant qu’il se goinfre, vous tripatouillez le système de visée de la catapulte, de telle sorte que le prochain boulet rebondisse sur la chambre à air, que vous aurez pris soin, au préalable, de disposer sur le cactus près de l’entrée. Retour à l’envoyeur : le projectile s’écrase finalement sur la catapulte avant que celle-ci ne dégringole la falaise.

Bel exemple de la logique made in Lucas Arts, exploitée depuis le premier opus de la série. Pour bien faire, privilégiez les solutions les plus tirées par les cheveux. N’évacuez jamais les combinaisons les plus invraisemblables. C’est là tout le charme du soft, mais c’est aussi son point faible car il est totalement exclu dans ces conditions d’en venir à bout sans la solution. Certes, les dialogues entamés avec la populace environnante peuvent vous mettre sur la piste. Encore faut-il avoir le courage d’épuiser toutes les répliques des QCM et faire les bons recoupements entre chaque révélation. On apprend ainsi qu’un étrange politicien australien, Ozzie Mandril, est à l’origine des petits malheurs de la populace. L’homme est en train de s’approprier l’île dont il espère bien devenir le prochain gouverneur. Les habitants désertent déjà en masse les environs, la plupart d’entre eux ayant misé et perdu leur villa dans une partie de bras d’insultes (même principe que le fameux duel d’insultes au sabre des opus précédents, mais vous l’avez compris, il s’agit de bras de fer ici). Comme c’est la tradition dans la série, les dialogues à base de vannes à deux balles, de private jokes et de jeux de mots balourds sont légion.
Au programme, dans cet épisode : un séjour sur l’île de Lucre (avec Carla et Otis, les deux tiers de votre équipage dans Monkey Island 3) pour y récupérer l’acte de propriété du grand-père d’Elaine auprès d’un trio d’avocats moyennement intègres, un séjour en prison à la suite d’un casse de banque qu’on vous impute par erreur, un voyage dans le temps, etc. Jusqu’à la rencontre finale avec… LeChuck ! L’ennemi de toujours n’a donc encore pas dit son dernier mot, ou plutôt sa dernière insulte. Et c’est au « Monkey Kombat », parodie maison de l’illustre jeu de mandales, qu’il faudra ici l’affronter.

La grande et unique nouveauté de ce quatrième épisode, c’est la 3D. Ce qui rapproche sensiblement le jeu de Grim Fandango, sorti l’année dernière. Avantage : visuellement parlant, c’est plus joli. Hélas, c’est la maniabilité du héros qui trinque. Difficile souvent de diriger Guybrush lorsque l’angle de caméra imposé nous colle le nez au personnage, ou bien, lorsqu’à l’inverse, celui-ci est trop éloigné. Pas simple non plus de récupérer tous les objets plantés dans le décor lorsque le jeu passe soudainement d’un décor à l’autre. Question interface, l’affaire est vite réglée puisqu’il n’y en a plus. Dorénavant, celle-ci est transparente et l’on utilise les touches pour exécuter une action particulière : parler, examiner, prendre, utiliser, combiner des objets, accéder à l’inventaire.

L’évolution graphique ne suffit toutefois pas à apporter un nouveau souffle au genre. Monkey Island a fait sa toilette, reste le principe éculé du jeu d’aventures basique, profondément ennuyeux. A moins d’avoir l’âme d’un Guybrush Threepwood précisément, pourquoi pas. Sinon faites donc une croix dessus.