Crispant. Une fois de plus, crispant. La suite de Dracula (Resurrection) a tout de la particule élémentaire propre à plonger n’importe quel contemporain dans la méditation sur la consommation croissante d’antidépresseurs. Malheureusement, ce n’est pas par ses qualités horrifiques que Dracula 2 se dégage du lot mais bien par ses défauts lourds de conséquences et cette impression persistante d’un gâchis absurde.

Dans un respect cérémonieux des règles du genre, Dracula 2 commence là où s’arrête le premier volume. Jonathan réussit à s’échapper de l’antre maléfique de la dernière idole glamour post-gothique tendance Joy Division. Manque de chance, sa très chère et tendre, Mina, est atteinte d’un mal étrange et quasi incurable. Doté d’une âme pieuse et charitable, le héros se voit dans l’obligation de traquer une dernière fois (?) son ennemi fétiche. Dracula, justement de passage, tentera tant bien que mal de récupérer un talisman secret, la décadence d’un Londres fin de siècle servant de décor lugubre à cette éternelle chasse entre les forces du bien et du mal.

L’interface, dans la logique des choses, affirme sans les corriger les graves défauts du premier opus. Fondées sur un moteur graphique dans le même esprit que Quicktime VR, les actions du personnage se déroulent dans des décors en 3D précalculée. La mise en scène est certes de qualité. L’exploration fluide laisse au joueur la liberté de regarder avec attention chaque détail mais au final c’est avec une certaine frustration qu’on observe les points de vue se succéder les uns aux autres sans avoir la possibilité de réellement choisir. Si un tel système fait le succès des visites virtuelles des musées, le bât blesse lorsqu’il est transplanté dans un univers oppressant, mélange d’énigmes et d’actions. Le gameplay se limite tout bonnement à dessiner de jolies arabesques à l’aide du curseur et d’attendre sa probable métamorphose, signe d’un élément mémorable. Rien de moins excitant que la découverte de la 395e fissure du mur nord-ouest côté jardin du manoir soi-disant hanté. Limite ennuyeux même. Carrément longuet quand le tout est géré par des accès continus au CD-Rom.
Le désespoir est porté à son comble lorsque les points de passage entre chaque scène contraignent le joueur à revenir en arrière pour se rendre vers un passage qui se trouve par ailleurs face à lui. Au début, ces quelques promenades aléatoires et chaotiques au clair de lune prêtent à rire, mais la bonne humeur fait vite place à un ennui circonspect. Finalement, il n’est pas rare que le souvenir triste des jeux d’aventures d’antan, version cassette sur plate-forme CPC ou MO5, évoque une fluidité exceptionnelle.

La trame narrative n’est pas en reste, et ressortent des placards poussiéreux les énigmes de nos grand-mères cent fois résolues les jours de pluie. Entre les références explicites aux jeux d’échecs et le petit manuel illustré du cruciverbiste, l’enquête se résume à un inventaire exhaustif des moyens nécessaires pour augmenter d’un dixième de point le QI du joueur.
Pire que tout, Dracula 2 n’est pas fondamentalement mauvais : les cinématiques, la retranscription du vieux Londres ainsi que le choix des atmosphères et des mises en scène témoignent d’un travail réfléchi et de qualité. Mais la présence répétée de défauts majeurs, ajoutée à une durée de vie assez courte, pénalise une fois de plus un titre pourtant porté à un meilleur avenir.