Il n’y a rien de plus beau que de descendre un zeppelin, le voir s’enflammer et s’écrouler, au fond d’un canyon ou s’écraser contre les murs d’un building gigantesque. De virevolter devants de magnifiques ciels crépusculaires, de plonger à l’intérieur d’une énorme carcasse rouillée reposant sur une des collines verdoyantes d’une île paradisiaque, d’éviter de justesse la façade vertigineuse d’une usine perdue au beau milieu d’un canyon désertique. Réminiscences de Porco Rosso, des comics ou des vieux serials américains, de The Rocketeer à Indiana Jones. C’est l’univers de Crimson skies : un monde uchronique et rétro-futuriste dans lequel les Etats-Unis se seraient scindés, après la Première Guerre mondiale, en une multitude de petits pays indépendants et où l’aviation serait devenue le mode de transport le plus courant. Quant au jeu lui-même, c’est une des dernières glorioles extirpées de leur cénacle PCiste par Microsoft pour participer à la grande entreprise de fusion ordinateur-console menée par la Xbox. Une entreprise qui n’a pas produit que du bon. Repensé et dépoussiéré, Crimson skies a magistralement réussi sa conversion : on ne pense jamais à un transfuge PC. D’abord parce que le jeu a une véritable esthétique, une ambiance machinique / champêtre particulièrement immersive -peu de jeux occidentaux peuvent en dire autant. Ensuite parce qu’il est parvenu à ranger ses concurrents « dogfight » directement aux oubliettes. Crimson skies a trouvé la tangente avec ce qu’il faut de linéarité et de liberté pour ne tomber ni dans la mollesse d’un Yager ni dans le rythme haché-scripté-compulsif de Rogue leader.

On démarre d’ailleurs chaque nouvelle zone de jeu par un gameplay semi-dirigiste à la GTA : jobs free-lance divers et variés, de l’escorte de marchandise au boulot moins gratifiant de livreur, défis, courses, etc. Les développeurs auraient pu pousser le concept un peu plus loin, en multipliant les missions libres et en retardant le moment où il faudra enchaîner les niveaux de manière nettement plus conventionnelle. Qu’importe, l’intention est là… Et puis il y a l’ivresse des combats : vifs, dynamiques et pas trop confus malgré un radar un tantinet minimaliste. Les adversaires et les alliés sont facilement identifiables grâce à un ciblage binaire et efficace et les arènes de combat suffisamment réduites pour ne pas désorienter le novice. Bref, Crimson skies évite avec maestria les écueils du genre. Certains le trouveront trop accessible, trop facile. En contrepartie, on perd cette frustration inhérente aux die-and-retry successifs caractéristiques de Rogue leader. Du coup, la progression est un poil trop rapide, d’autant que les environnements ne sont, au final, pas très nombreux. Mais elle est aussi plus fluide, plus agréable, et certaines missions demandent tout de même un minimum de doigté. Crimson skies privilégie l’immersion au challenge. C’est un choix qui peut déplaire. Mais à moins de jouer les hardcore-gamers psycho-rigides, on voit mal comment on pourrait passer à côté d’une des plus belles surprises de l’année sur Xbox.