Dernier vétéran du rock’n’roll des origines qui soit encore en activité et, selon lui, chaînon manquant entre Orson Welles et Chuck Berry, Kim Fowley est aussi et surtout intarissable à propos de son sujet préféré : lui-même…

Chronic’art : Living in the streets vient d’être réédité par Microbe, en France. Que penses-tu de ce disque aujourd’hui ?

Kim Fowley : C’est un disque qui a été fait il y a 26 ans… Il y a 26 ans, les choses étaient comme aujourd’hui : j’aimais être avec des amis et me faire plaisir en passant du temps en studio. J’enregistre tous les jours depuis… 1959 ! J’enregistre tout le temps, en fait, voilà ma vie. Je peux aller aux toilettes, aller à la plage ou faire autre chose, mais je fais toujours de la musique.

Au cours de ta carrière, tu as utilisé beaucoup de pseudos (Lance Romance, Jimmy Jukebox, Baby Bulldog…). Pourquoi certains disques sont faits sous des pseudos et d’autres non ?

Parce que j’ai tellement d’idées, tellement de visions, tellement de possibilités vocales – j’ai beaucoup cherché de ce côté – que le public, même dans le monde entier, n’est pas prêt pour recevoir autant de disques en provenance d’une seule et même personne. Voilà pourquoi j’utilise des pseudos.

Il y a une rumeur persistante qui dit que tu serais en fait le mystérieux Napoleon XIV, auteur de They’re coming to take me away, ha ! ha !… Personnellement, je n’en crois rien mais pourrais-tu confirmer ça pour nos lecteurs ?

J’ai effectivement enregistré cette chanson sous le nom Kim Fowley et quand Napoleon XIV, qui est en réalité Jerry Samuel (arrangeur du crooner Sammy Davis Jr, ndlr), a choisi de ne pas faire de show pour son disque, parce qu’il était trop vieux, je me suis mis un masque et un déguisement et j’ai fait une tournée sous le nom de Napoleon XIV, en Angleterre et ailleurs. Mais j’avais aussi mon disque qui marchait alors, à certains moments, sur scène, j’étais Kim Fowley et à d’autres Napoleon XIV… parfois même dans la même ville mais dans des salles différentes !

Il y a un disque étrange, des sixties, qui s’appelle The Crazy People. Certaines personnes pensent que Wild Man Fischer est sur ce disque et d’autres pensent que c’est toi. Connais-tu ce disque ? Y as-tu participé ?

Un disque de Crazy People ?

Oui.

Quelle compagnie de disque ?

Je ne me souviens plus…

Je n’ai jamais entendu parler de ça, en fait. Mais j’ai chanté sur un disque de Wild Man Fischer. On entend ma voix sur son premier album (An Evening with Wild Man Fischer – 1968, Bizarre/Straight -le label de Franck Zappa, ndlr).

Que penses-tu de son travail ?

Je pense que c’est un tas de merde ! Il me déteste et je le déteste aussi. Je ne l’ai jamais aimé. Son truc était intéressant au début, mais c’est un sale type, un arnaqueur toujours prêt à s’accrocher aux gens. Est-il toujours vivant ?

Je pense que oui…

Il est vivant ou pas ?

Il est vivant…

Dommage ! Allez, continue !

Tu t’es essayé à des genres très différents au cours de ta carrière, de la pop bubblegum ou psyché des débuts (Love is alive & well) en passant par les albums heavy comme Outrageous ou I’m bad, expérimentaux comme Good clean fun, jusqu’à des tentatives techno et drum & bass (sur Trip of a lifetime). Certains peuvent te reprocher d’être un « faiseur », sans style défini et…

… Non ! Je suis tellement… Les styles sont très différents parce que mon talent me le permet. Je fais des tonnes de choses. Je chante sous plein de noms différents parce que je peux faire tout ça.

Tu as beaucoup travaillé avec Mars Bonfire de Stepenwolf. Dans Combo !, un magazine français, il déclarait que tu l’avais engagé lors d’une tournée à la fois pour ses talents de guitariste et de Karatéka. C’est vrai ?

Il est prof de Judo. Et de Karaté aussi. C’est lui qui entraînait la police routière et les shérifs de Comté, alors c’était un vrai dur et il se battait très bien.

Qu’est-ce qui te poussait à vouloir un garde du corps ?

Ca faisait partie de ses capacités, pourquoi ne pas utiliser également celles-ci ? C’était un expert donc il pouvait se battre comme un expert. J’ai toujours eu besoin d’un garde du corps, pas pour me protéger, mais pour protéger les gens autour de moi !

C’est-à-dire ?

Personnellement, je n’ai pas besoin que l’on m’assure une sécurité. Mais les mauvais garçons ont besoin d’être protégés de moi. Car je suis aussi un mauvais garçon.

Dans les années 60, quand tu rencontrais des stars, tu leur demandais quel était leur gimmick. Dylan t’a dit : « Je pose des questions et je raconte des histoires » ; John Lennon t’a dit : « Je tiens à niveau ma collection de disque » ; et Brian Wilson t’a dit : « Je chante le calendrier : 8 mois d’école et 4 mois de plage ». Quel serait TON gimmick ?

(très détaché) « Having fun ».

En tant que producteur, on a dit de toi que tu cueillais les talents au moment où ils naissaient et que tu disparaissais quand les choses devenaient sérieuses. Qu’en penses-tu ?

J’ai vendu 102 millions de disques, en 44 ans, dans 110 pays… J’enregistre tout le temps, pour plein de raisons, avec un nombre de gens très divers. Je ne crois pas que ce soit vrai, en tant que producteur…

Daevid Allen, de Gong, te décris comme un « studio shaman ». Pour quelle raison selon toi ?

Parce que je suis magique, quoique je fasse. Je vois les choses comme ça.

As-tu une méthode particulière lors des enregistrements ?

Oui : donner cette magie aux machines, aux instruments.

Quelle a été ta véritable participation à Ciao Manhattan d’Andy Warhol (réédité récemment en DVD dans une version « 30e anniversaire », ndlr) ?

J’ai co-écrit et produit les chansons.

Tu ne joues pas dedans ?

Je l’ai produit. J’ai produit la musique qui était aussi dans ce film. C’est tout. Tu sais, c’est juste un jour dans ma vie !

Pourquoi un album comme Outrageous n’a pas eu l’ampleur et la reconnaissance d’un disque comme Fun house ?

Parce que Iggy Pop est surestimé et que Kim Fowley l’est moins.

Est-ce qu’il existe des inédits de cet album ?

Non, car il a été fait en une nuit. En 4 heures même.
Incroyable ! Tu n’as jamais caché ton admiration pour Iggy Pop. Tu as même proposé des chansons aux Stooges (Ain’t got no transportation sur Animal God of the Street – 1971) et on aurait rêvé vous voir travailler ensemble : pourquoi n’est-ce jamais arrivé ?

En fait, j’avais été contacté pour produire l’album qui devait suivre Raw power. On a d’ailleurs travaillé ensemble, lui et moi. On a un peu répété et Tornado Turner, du groupe Fraternity of Man, dont le vrai nom est Warren Klein – c’est le leader du groupe – m’a contacté pour un autre projet et entre-temps il a été viré de Colombia. Quand je suis revenu, aucune compagnie ne voulait plus entendre parler d’Iggy Pop. Ceci dit, on avait encore cet album à faire. On a recommencé a travailler, on a répété, on a travaillé des chansons mais tu sais comment il était : une fois que la date d’enregistrement a été fixée, il m’a expliqué qu’il voulait abandonner. On s’est dit bye-bye et l’album n’a jamais vu le jour.

Sais-tu ce qu’il pense de ton oeuvre ?

Iggy Pop ne pense à rien d’autre qu’à lui-même. Il se fout un peu de tout et ne pense qu’à lui.

Que penses-tu de sa carrière solo ?

Il a eu de bons moments. Comme tout le monde, il y a des trucs meilleurs que d’autres. C’est comme pour moi : tout n’est pas excellent mais la majeure partie vaut la peine d’être connue…

D’un certain point de vue, je trouve que son Zombie birdhouse est assez proche de ton album Bad news from the underworld. Qu’en penses-tu ?

Je n’ai jamais entendu ce disque…

Souvent, sur tes disques, tu invites les auditeurs à te contacter. Sont-ils beaucoup à l’avoir fait ?

Oui.

Et qu’est-ce que cela t’apporte en règle général ?

Du sexe ! J’ai eu des relations avec les femmes qui me contactaient…

Le live que tu as sorti avec les BMX Bandits (Hidden agenda at the 13th note) montre à quel point tu es un grand entertainer. Est-ce que d’autres enregistrements live pourraient voir le jour ? De quelle époque ? Avec quel accompagnement ?

J’ai fait un album à Detroit avec des membres d’Outrageous Cherry, The Witches et Andre Williams. Et pas mal d’autres groupes de Detroit (comme Godzuki ou His Name Is Alive, ndlr]. On s’est éclatés comme des bêtes, c’était magique, on était en 1997. J’ai fait ça avec Matthew Smith, le leader d’Outrageous Cherry qui est devenu plus tard le producteur de The Go, sur Sub Pop, quand Jack White, le leader des White Stripes, était dans le groupe. Mais j’étais à Detroit avant que ce Jack White soit… visible, en 1997. Cet album est enregistré, mais il n’a jamais été édité. C’est le dernier enregistrement live que j’ai fait. Il est plutôt pas mal.

Il est comme Michigan Babylon ?

Ca a été fait la même semaine que Michigan Babylon. Il y a un autre album inédit, de la même période, qui s’appelle Culture of despair : un projet unplugged avec les mêmes musiciens. J’ai fait ces quatre albums en six jours. Le quatrième album est basé sur un concept « questions / réponses » : j’étais là à poser des questions et les groupes devaient répondre. Les gars se sont battus dans le studio et l’album n’a jamais été achevé ! (franchement amusé) Mais ce disque live est achevé, il fait plus d’une heure, il faudrait s’en occuper et… c’est vraiment un bon truc. J’étais à Detroit avant qu’il y ait les White Stripes et que tous ces autres groupes se mettent à sortir des disques. Je suis venu à ce moment là.

Est-ce que ce Michigan Babylon annonçait le revival rock actuel ?

C’était la première fois, à Detroit, que des petites merdes blanches se réveillaient, étaient ensemble et allaient dans un studio. On a fait l’album en un jour, on avait ces filles à poil qui traînaient, des drogues dangereuses, de l’alcool. Des gens venaient qui vivaient dans la rue et dormaient dans les voitures, je crois que l’on entend ça aussi sur le disque. Il y a beaucoup de gens sur ce disque : des gens qui gueulent et crient et frappent tout autour de nous ! (rire)

L’album avec les BMX Bandits a été fait avec Mike Bennett, avec lequel tu as travaillé ensuite, et qui jouait aussi avec The Fall dans les années 90. Que penses-tu de ce groupe et de Mark E.Smith, leur leader ?

Mike Bennett me doit de l’argent. Pour ce disque et tout ceux qu’on a fait pour Receiver Records (label de Mike Bennett sur lequel sont les disques techno de Kim, ndlr). Il doit aussi de l’argent aux BMX… du coup, je ne l’apprécie pas vraiment en tant que personne. Par contre, j’aime Mark E.Smith d’un point de vue personnel car je pense qu’il est aussi tourmenté que moi !

Quel est l’album que tu préfères ? Lequel conseillerais-tu à quelqu’un qui ne te connaît pas ?

Ceux qui sont sur mon site web, il y en a deux : Adventures, dont quatre titres en écoute qui parlent d’Hollywood et de terrorisme et puis ; dans la partie « Notes to readers, » il y a un lien vers MP3.com où tu peux entendre des morceaux de Young flesh city, des morceaux que j’ai enregistrés à la Nouvelle Orléans et en Irlande, où j’habitais il y a quelques années encore. Les titres d’Adventures ont été faits à la maison, là où j’habite maintenant dans les Redlands, en Californie. J’ai fait cet album avec Roy Swedeen, le dernier batteur des Misunderstood. Il a été ingénieur et mixeur des disques des Tornados également, un groupe pop et surf… Il ont fait un tube énorme, je ne sais pas si tu t’en souviens…

Oui, Telstar, un morceau de Joe Meek, sur Decca, en 1963 (Roy vient également de sortir un album sous le nom de The Chubbies pour Sympathy For The Record Industry, ndlr).

Je ne sais pas pourquoi mais ce groupe n’a tourné qu’aux USA, comme Elvis… mais il n’a jamais été connu au delà des frontières des Etats-Unis. Voilà ! Question suivante ?

Sur ton site, tu propose aux maisons de disques un album à sortir (Adventures). Est-ce difficile, aujourd’hui, de sortir un disque quand on s’appelle Kim Fowley ?

Ca n’est pas difficile. C’est juste la même chose que de demander à des femmes de m’écrire. J’invite les compagnies de disques à me contacter et faire connaître cette musique qui existe car ils ne sont pas spécialement au courant de ce qui se passe. Il y a pas mal de gens qui peuvent penser que je suis mort ou en prison ou que je suis dans un hôpital psychiatrique, ou même en train d’errer dans un endroit perdu. Que ces morceaux aient été faits hier ou il y a 20 ans, peu importe, il y a toujours des gens qui ne les connaissent pas… C’est surtout pour ça que j’ai créé mon site : pour que les bonnes informations circulent. Il y a deux sortes de fans de Kim Fowley qui sont très différents : ceux qui connaissent et aiment mes vieux trucs -ce que j’ai fait de 1959 à… (hésitant) 2001 – et des gens qui n’avaient jamais entendu parler de moi, qui ne savaient même pas que j’existais et n’aimaient que mes nouveaux trucs mais pas les anciens…

Qu’est-ce qu’une bonne chanson pour toi ?

Quelque chose que les gens stupides aimeront ! (rire)

Tu as souvent laissé entendre que certaines de tes paroles étaient en partie écrites par tes jeunes girlfriends. Qu’en est-il ?

Ecrit par des filles ? Non ! Jamais… J’ai couché avec plus de 4 000 filles et ces 4 000 filles ne m’ont pas écrit de chansons : ça en aurait fait un paquet… Non, jamais ! C’est toujours moi qui m’occupe de mes paroles. C’est moi qui écrit les textes, qui fait la musique et qui enregistre tout ça. Il m’arrive de travailler avec deux ou trois personnes pour des raisons bien précises et des gens peuvent utiliser ce que j’ai fait : les Byrds en ont utilisé, Red Kross ou Sonic Youth ont enregistré des trucs à moi pour des raisons qui les regardent. Moi, je fais mes propres chansons, que je chante ensuite.

J’ai lu que tu vivais entouré des services d’une strip teaseuse qui te fait la cuisine et tout le reste. Est-ce vrai ?

Oui ! J’aime les salopes, les femmes qui se comportent comme des animaux… Et ces femmes m’aiment car je baise comme un chien ! Je baise comme un vampire !

Tu as travaillé avec des gens très divers : quelle raisons t’ont poussé à travailler avec Kiss, Guns & Roses ?

Un génie peut travailler avec qui il veut et je peux travailler avec n’importe quelle personne qui me le demande. Je suis comme ce gars, en France, qui est mort. Ce Serge… Gainsbourg, c’est ça ?

Oui !

Je suis comme lui ou Georges Martin ou Sam Philips ! Je suis une combinaison de… Ce type baisait des tonnes de putes et se comportait comme un salaud talentueux. Et Sam ou Georges Martin, ils ont produit Elvis ou les Beatles et c’étaient des producteurs de disques qui avaient un véritable don. En ce qui me concerne, je suis bon chanteur et performer mais je peux être bon aussi pour d’autres personnes, je ne m’occupe pas que de mes chansons, mais aussi de celles des autres.
Que penses-tu de ce que fait Daniel Johnston ?

C’est un trou du cul. Je veux dire, il est méchant et taré… J’ai discuté avec lui il y a longtemps -et sa musique était intéressante-, mais c’est un idiot. Même si sa musique peut être bonne, lui, il est horrible. C’est tout…

Lors d’une interview, il m’expliquait que c’était toi, en personne, qui l’avait contacté au milieu des années 80 pour lui produire un album complet. Il y a quelques titres de son album Continued story qui semblent venir de ces sessions. Qu’avez-vous exactement fait ensemble ?

Rien, de mon point de vue. C’est arrivé il y a longtemps. Et il n’a jamais eu un seul disque d’or. J’en ai plein, on peut les voir sur mon site web : je suis meilleur que lui.

Quand tu as travaillé avec Teenage Fanclub, tu devais jouer avec eux sur scène pendant le Festival de Reading. Il semble que John Peel s’y soit opposé. Pourquoi ?

Il était fou à cause du disque de Gene Vincent que j’avais produit pour sa compagnie, il y a des années de ça (I’m back & I’m proud, en 1969, ndlr) Ce que j’ai compris, c’est qu’il était amer à cause de ce disque de Gene Vincent -qui a été réédité une dizaine de fois au cours des 24 dernières années. Et John est amer parce que lui et Clyde, un gars de Dandelion, insistaient pour que ce que j’allais enregistrer avec Gene Vincent soit produit dans un studio de West Hollywood, ce qui ne pouvait qu’être stérile : c’est un endroit où on ne peut pas être à l’aise car c’est bondé de secrétaires et de bureaux… Nous voulions enregistrer dans le Mississippi, dans un studio où j’ai fait ces disques de Mr Big Stuff qui m’avaient éclaté, et il y avait ces Rednecks dangereux qui attendaient d’être les nouveaux Blue Caps (le groupe de Gene Vincent, ndlr). Ils faisaient des disques parlant de Vaudou, de zombies, de trip mortels, de sexe, de barbecue, d’alligators… Et John a dit : (prenant une voix de fausset) « Non, non, non ! On ne peut pas faire ça ! On doit faire un disque gentil et poli ». Et on s’est rebellé. On a dit que nous devions descendre dans le Sud et faire ce disque à notre façon. Ce qu’ils n’ont jamais voulu. Ce disque est pas mal, mais il aurait pu être bien meilleur si on avait laissé Gene Vincent aller dans le Sud et faire comme il l’entendait. C’est là où ses meilleurs disques ont été faits, dans le Sud ! Pas à l’Ouest ! John Peel a son point de vue, mais il ne m’a jamais rencontré et il n’était pas là, dans le studio. Il a juste dit : « Non, vous ne pouvez pas aller là », alors qu’il était en Angleterre et qu’il ne pouvait pas comprendre. Je ne l’ai jamais rencontré ! Mais j’ai quand même fait ce disque avec Teenage Fanclub. Et ce John Peel n’a rien pu faire contre ça : je suis sur cette compilation officielle et tous ceux qui sont allés à ce Festival pour le week-end (80 000 personnes) ont eu avec leur ticket ce double album officiel du festival. Ma chanson est sur le premier disque et c’est même le premier titre. Après tout, pour moi, c’était une réussite ! Kim Fowley is a rebel WITH a cause. La cause, c’est faire ce que je veux quand je veux !

Sur les enregistrements live que je connais de toi, notamment le live avec les BMX Bandits, tu sembles mettre un point d’honneur à improviser une partie de tes shows. Comment est-ce que cela a été ressenti par les BMX Bandits ?

On a fait un paquet de fêtes après tout ça… (rire). C’était fun et réussi. J’ai fait un disque, j’ai un disque qui sort le mois prochain avec Francis Mc Donald, sur son label Shoeshine Records, où je chante et lui fait tous les instruments. Ca s’appelle Fantasy wolrd et c’est bon. On a fait ça dans un studio de Riverside à Glasgow. J’ai quatre albums qui sortent en Europe d’ici juillet 2003 : il y a ce disque, Living in the streets sur Microbe, ce Fantasy world sur Shoeshine, et Ace Records sort un disque qui s’appelle Impossible but true : une collection de 32 chansons ou productions que j’ai pu faire avec des gens célèbres. Enfin, j’ai un disque qui sort au Brésil et en Argentine sous le nom de SAND, c’est-à-dire Kim Fowley et Roy Swedeen, avec comme special guest Chris Darrow et Matt Buda…. Il y a aussi des membres de Kaleidoscope. Nous formons un groupe qui n’existe que de temps en temps et nous vivons tous dans le désert. C’est dans le style du Paris-Texas de Wim Wenders, avec ces indiens américains baisant dans les déchets et mangeant dans les poubelles, et ces filles nues qui crient comme si on était dans un film de David Lynch. Si tu aimes ces films, tu aimeras ce disque. C’est comme si Lou Reed vivait dans le désert. Essaye d’écouter ça, c’est sur Zip Records. J’ai encore un autre album, disponible uniquement sur Internet, qui s’appelle Strange plantations de Kim Fowley et Buzzy Beano. J’en parlerai dans les semaines à venir sur mon site. Sinon, au moment où je te parle, je suis en train d’enregistrer un nouvel album qui pourrait bien être l’album le plus sombre que j’ai jamais fait sous le nom Sky Hawk. Ca s’appelle Disfonctional. Ca parle de banlieues et de l’aide sociale aux USA, de mort et de sexe aussi, et de la mort du rock n roll, de la naissance du XXIe siècle ! C’est mon album le plus noir. Tu te souviens de Goldfinger et de sa manière de donner aux gens la couleur de l’or ? Eh bien j’ai peint mon corps de plusieurs couleurs à la manière d’un afro-américain. Avec le maquillage, il y a des photos où je suis entièrement noir -comme un noir- et j’ai aussi du maquillage de martien alors je suis tout bleu comme un gars qui vient de Mars ou un X-men, ce genre de trucs… Pour chaque chanson, j’ai un maquillage adapté. En fait, je me maquillais et je rentrais dans la chanson. C’est peut-être le disque le plus bizarre de tous…
Quoi d’autres ? J’ai cinq films qui sortent et je suis en train d’écrire un livre… En fait, j’ai tellement de choses qui doivent sortir que j’arrive à peine à me souvenir de tout ! J’enregistre tout le temps et j’oublie un peu ce qui se passe. Dans un de ces films, je suis avec David Bowie, Keanu Reves et Cher (Major on the Sunset Strip, un film qui retrace la vie de Rodney Bigenheimer, le célèbre DJ de L.A. avec également Beck, Courtney Love, Oasis…, ndlr). Ca de la vie à Hollywood. Je joue le rôle de quelqu’un d’autre dedans et je chante également. Je suis également dans le film des Ramones, qui s’appelle End of the century. C’est un film qui est sorti en avant-première, la semaine dernière, au Festival du film de Tribeca, organisé par Robert de Niro. On est aussi sur le bonus du DVD, avec Roy Swedeen, moi et sa fille Erica Swedeen, qui a maintenant 11 ans. C’est un groupe d’enfant que j’ai monté qui s’appelle Toy Club et c’est comme… Star Wars et les Archies en même temps ! Ce sont des animaux de l’espace, il y a des enfants de 10, 11 ans, des adultes, des chiens qui parlent, des grenouilles qui participent tous au disque : c’est de l’animation. Autre film encore : celui sur Jimi Hendrix qui s’appelle My dinner with Jimi et qui parle de la vie de Jimi avant qu’il ne soit connu. Dedans, il y a ma musique et le documentaire sur les Runaways où je figure comme acteur, producteur et songwriter… Il y a quelque chose en route avec Jim Jarmush aussi et… Qu’est-ce que tu penses de tout ça ?

Pas mal ! (rire)

Tu vois, j’ai tellement de projets en route que je ne peux plus m’occuper d’un groupe, d’un chanteur, ni même de moi. J’enregistre tout le temps et j’ai ce livre à achever. Il va être publié par Feral House. C’est une maison d’édition passionnante et importante aux Etats-Unis. Adam Parfrey travaille sur ce livre avec moi : ce sera à la fois un livre et un DVD. Ils ont publié le livre de ce type de l’Eglise de Satan à San Francisco et ils bossent aussi avec Marylin Manson : j’en ai parlé avec lui. Le titre de travail est Confession of a rock’n’roll madman as known as rock’n’roll genius, mais je ne pense pas le garder, ce n’est qu’un titre de travail. Allez ! Une autre question !

Sur plusieurs chansons, tu parles du fait que les gens qui n’ont pas d’enfants meurent seuls et abandonnés. Est-ce une angoisse réelle chez toi ?

Je suis déjà mort ! (rire) Je suis mort depuis… 1980 je pense… oui, autour de 1982. Je suis mort depuis 23 ans !

Alors, es-tu au paradis ou en enfer ?

Où crois-tu être ? Nous sommes tous en enfer !

Sur ton site, quelques photos te montrent au milieu de tes peintures. Depuis combien de temps peints-tu ?

Je n’ai pas peint ces tableaux. On me les a offerts en cadeau. Quelqu’un qui m’a aimé les a peint ! (rire)
Dernière question: pour toi, c’est quoi être rock’n’roll en 2003 ?

Ecoute simplement Living in the streets. J’ai fait ce disque en 1977 en pensant à aujourd’hui. Ceux que je fais maintenant, comme Sky hawk, Adventures ou Young flesh city, ainsi que tous ceux qui ne sont pas encore sortis, c’est de la musique pour les vingt prochaines années. J’ai toujours fait des disques en avance sur leur temps. Je pense qu’en ce moment les français ont besoin d’un nouveau héros car… Joe Strummer est mort, Vince Taylor est mort, Eddie Cochran est mort et je suis le dernier des années 50, 60, 70, 80 qui fait toujours une musique nouvelle. Tous les autres ont abandonné ou sont morts. Certains ont disparu. Kim Fowley est toujours là, toujours un vrai monstre du rock’n’roll, the king of subhuman sounds… Est-ce que je peux passer un message pour les françaises ?

Oui !?

J’ai une grosse bite et je baise comme un vampire avec l’énergie d’un violeur afro-americain ! (rire) Je bouffe les chattes comme une femme et mon pouvoir et mon aura sexuel est celui d’un chien sauvage. (rire) Alors, les femmes françaises qui veulent se marier ou baiser retiendront mon attention en m’envoyant quelques photos après avoir lu tout ça. (rire)

Merci Kim, on donnera ton adresse ! (rires)

Oh ! Est-ce que tu connais une chaîne de télé française qui s’appelle M6 ?

Oui.

Ils sont venus me voir chez moi et m’ont filmé en train de jouer avec Roy Swedeen, il y a quelques mois. Nous avons joué des titres parlant de Phil Spector. Est-ce qu’ils ont passé ça ?

Je ne sais pas.

Tu en as entendu parler ?

Non, en fait. Peut-être qu’ils ne l’ont pas passé encore…

Ah ! Il faut que tu voies ça : on a joué quelque chose qui s’appelait The Ballad of Phil Spector et ensuite, en direct, on en a fait une autre qui s’appelle Body guard : Phil Spector is a recluse classic murder boy. Maintenant que j’y pense, c’était assez sauvage et ils ont peut-être préféré ne pas passer ça à la télévision. Ils l’ont peut-être fait, je ne sais pas. On m’a dit qu’il y avait une photo de moi dans le dernier numéro de Max, en France : tu l’as vue ?

Euh… non…

Mais ils m’ont confondu avec Rodney Bingenheimer : je mesure 2 bons mètres et je ressemble à… une girafe à la vanille ! Lui fait dans les 1 mètres 60 et ressemble à… enfin, je ne sais pas comment ils ont fait pour nous confondre ! Ce Phil Spector, il m’a produit une fois, sur un album qui s’appelle Phil Spector 1973 to 1975. Sur cet album, où tu as aussi Cher ou Dion, je n’ai jamais été payé : j’attendais des royalties et shame ! shame ! shame !… je t’enverrais un copie de Ballad of Phil Spector, ok ? Alors, tu es content de parler avec Kim Fowley ?

Bien sûr ! C’est incroyable !

Suis-je comme tu croyais que j’étais ou différent ? Qu’est-ce que tu as à me dire là-dessus ?

J’avais lu des interviews de toi donc j’avais une petite idée sur la question. J’ai lu l’interview dans Ugly Things… (revue américaine qui lui a dédié un numéro spécial en 2001, ndlr)

Elle est bonne, effectivement. Il faut vraiment dire au françaises et aux filles que je dois coucher avec elles. Car je suis un vampire. Tu as vu ce film avec Klaus Kinski ? Je lui ressemble de plus en plus mais je suis encore plus grand. Mais lui est mort, il est encore plus mort que moi ! (rire) Je suis comme plein de gens qui étaient vivants auparavant mais je suis devenu… Les gens en France attendent un nouveau héros. Et ça pourrait être moi ! Car je mérite qu’on m’apprécie puisque ma musique est bonne. Toi, tu as aimé Living in the Streets ?

Evidemment !

Je suis content que Microbe se soit chargé de ressortir ce disque. Est-ce qu’il passe à la radio ? Est-ce que les gens en parlent ? Quelles sont les réactions ?

Il y a pas mal d’articles et les gens en parlent

Qu’en disent-ils ?

Ils ont l’air d’aimer, de le trouver bon…

Mais c’est vrai ! (rire) Je veux dire, le reste ce n’est pas de la merde non plus, c’est bien aussi. Ce que j’ai fait est basé essentiellement sur la folie et la magie. Mais la plupart des gens ne sont pas en accord avec leur propre magie, leur propre folie… Ils vivent dans des endroits minables et rêvent. Je vis dans des endroits minables et je fais de la musique. La différence entre Phil Spector et Kim Fowley, c’est que Phil Spector tue des gens et que Kim Fowley fait de nouveaux albums pendant que LUI n’en branle pas une. Tu sais, Phil Spector est venu me voir pendant une fête, en 1992, et m’a dit : « Va te faire foutre, je suis un meilleur producteur que toi ! ». Et je lui ai répondu : « Toi, tu as abandonné avant la fin du siècle, après Black pearl, et tu ne fais plus rien depuis. J’ai duré plus longtemps que toi et je continuerai encore, va te faire foutre ! » (rire) N’hésites pas à dire aux filles de m’écrire car je risque de venir en France un de ces jours. Mes concerts durent dans les trois heures. Et je m’amuse : je fais venir les gens sur scène, le public peut intervenir comme il veut, s’il veut chanter quelque chose, il le fait. Si les filles veulent être nues, elles le peuvent. Les gens peuvent baiser sur la scène avant et pendant mon show : les filles baisent les filles, les mecs baisent les mecs, les mecs baisent les femmes et les femmes baisent les animaux… Tout arrive, c’est un moment exceptionnel quand je suis là ! Tu vois, c’est aussi pour ça que John Peel ne voulait pas me voir monter sur scène, à Reading. Il ne voulait pas voir des femmes sous des animaux, des pédés et des machines d’alien baiser sur scène (rire) pendant que je chante. Pourtant, je sais contrôler un public. Quand j’avais joué à Londres, il y avait un mec et sa copine qui étaient venus sous LSD et, pendant que je suis allé aux toilettes et manger un morceau, le mec est monté sur scène et s’est déshabillé en criant et en délirant. Sa copine aussi, et ils ont commencé à s’emboîter sur scène, pendant 10 minutes, le temps que je revienne… J’aime bien que 20 ou 30 personnes montent sur scène à différents moments du show. Grateful Dead fait aussi des concerts de trois heures mais, moi, je joue plus de morceaux et je fais agir le public. C’est la différence ! Il y a toujours une sorte de confusion quand ça arrive car le public est habitué à danser, aller en boîte, se défoncer ou rester sur une chaise à regarder des gens jouer la même chanson depuis 20 ans. Quand Kim Fowley est dans ta ville, il chante sur ce qui se passe ce soir-là, la musique est nouvelle chaque soir, car je laisse les gens entrer aux soundchecks et j’écoute ce qu’ils ont à me dire. Et je lis les journaux locaux, je cherche à savoir ce qui se passe dans cette ville et je chante sur CETTE ville, CE soir-là. Je ne fais rien de ce qu’il y a sur mes disques, je n’essaie même pas. Si tu veux entendre la même chose, tu achètes l’album mais… si je viens à Marseille, je parlerais d’héroïne (rire), si je viens à Paris, je parlerais de la douleur (rire), si je viens à Bordeaux, je parlerais de poisson (rire), si je viens à Londres, je parlerais de Fish & Chips ! Je chante sur la nourriture et sur… la vie, tu vois !

J’aimerais bien te voir, effectivement !

C’est possible ! Tu sais, mon père était Irlandais, ma mère, américaine, donc, je ne suis pas complètement américain. Je suis à moitié l’un et à moitié l’autre… Tu savais ça ? Je suis un européen comme toi ! Je suis un citoyen Irlandais et un citoyen Américain. J’ai la double nationalité. Et, au début des années 70, je suis allé étudier à l’Université de Stockholm. J’avais choisi la faculté de dentiste car je m’intéressais aux dents, mais je n’ai jamais achevé mes études… Puis, j’ai habité en Norvège, en Suisse, en Hollande, en Italie, en Ecosse, en Irlande, au Pays de Galles, au Canada, en Nouvelle Zélande… A Hawaï, Samoa, au Mexique… J’ai habité à Vienne, en 1995, ouais, en Autriche… Je fais de la musique dans le monde entier. J’habite aux Etats-Unis mais ma musique est faite pour le monde entier.

Propos recueillis par

Lire notre chronique de l’album de Kim Fowley

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700-U East Redlands Blvd
PMB 352
Redlands, Ca. 92373 USA