A l’occasion de la sortie de Sessions, quelques questions posées à l’arrache à Sébastien Tellier à propos de sa musique mais aussi des jeux vidéo, autre passion / addiction du musicien.

Chronic’art : Sessions ressemble sous certains aspects à une auto-célébration. On peut voir le fait de se reprendre sous un format « classique » comme une manière de légitimer son appartenance à une culture mainstream, de se faire rentrer dans l' »histoire ». D’où t’es venue cette idée ?

Sébastien Tellier : C’est en voyant Willy Nelson faire des enregistrements radio dans la série TV américaine Monk que m’est venue l’idée reprendre mes morceaux. Je suis entré une journée dans un studio parisien (le 30 décembre dernier pour être précis) avec Simon Dalmais, mon pianiste, et on a concrétisé le projet.

Chacun de tes albums est très différent du précédent. Est-ce une volonté de surprendre tes fans, d’explorer de nouveaux champs ? Qu’est-ce qui préside à cette versatilité ?

Depuis toujours, je suis un inconditionnel de Steven Spielberg parce qu’il s’applique à faire des films radicalement différents les uns des autres. Je conçois ma musique un peu comme il conçoit ses films : c’est-à-dire toujours faire en sorte de provoquer la surprise, de jouer le suspense.

C’est ton côté joueur aussi ? Nous savons que tu pratiques pas mal les jeux vidéo…

Tout à fait. D’ailleurs mon rapport au jeu est pathologique : j’ai une véritable addiction pour le jeu vidéo. En ce moment, je passe mes nuits sur Conflict : Global, un jeu de guerre stratégique auquel on peut jouer à plusieurs.

Elle remonte à quand cette addiction ?

Ca date de Donkey Kong, version Game & Watch, le jeu électronique de poche du début des années 80… Depuis, j’ai suivi toute l’évolution des machines et des jeux vidéo, jusqu’à GTA San Andreas et Worms sur PlayStation pour les derniers coups de cœur.

Que pense globalement le musicien que tu es des musiques de jeux ?

Les musiques de jeu sont souvent stériles émotionellement. Personnellement, c’est un marché que j’espère vraiment pouvoir un jour conquérir, parce que ça m’intéresse bien sûr.

D’une manière ou d’une autre, le jeu vidéo a-t-il une influence sur ta musique ?

Totalement ! GTA 3 a par exemple complètement influencé la deuxième partie de mon album Politics : écoutez Zombie et vous verrez immédiatement ce à quoi je fais référence…

Il y a chez toi un côté crooner lorsque tu es simplement accompagné par un piano. Est-ce que c’est un genre d’interprétation que tu apprécies par ailleurs ? Tu reprends un morceau de Christophe par exemple. Il est une influence importante pour toi ?

J’aime bien Sinatra mais honnêtement le style crooner m’ennuie assez vite en général. Le rapprochement avec Christophe est assez judicieux car ce que j’aime chez Christophe c’est son côté « crooner femelle ». Je dirais d’ailleurs qu’on a ça en commun : nous sommes un peu tous les deux des crooners au féminin…

Il y a une dimension lyrique dans ces Sessions, qui tranche (par son premier degré) avec tes productions précédentes : on t’imagine habituellement plus « post-moderne », presque cynique par rapport à la culture pop… Est-ce que tu théorises beaucoup ton travail ordinairement, et est-ce que cet album est, comme il paraît l’être, plus spontané ?

Mon travail est entièrement théorisé dans le sens où je pense chaque disque avant de l’enregistrer. Certaines raisons sans doute psychiatriques me poussent toujours à détester mon époque et donc à trouver d’autres chemins… En ce qui concerne Sessions, son côté spontané est également quelque chose de réfléchi.

La Ritournelle est un tube, et déjà un classique. Qu’est-ce que ça fait d’être l’auteur d’un tube ?

Je dois avouer que c’est un sentiment jouissif… J’ai appris que pas mal de couples passaient La Ritournelle pendant leur cérémonie de mariage : cela me rempli de joie !

Bientôt mégalo ?

Je suis l’inverse d’un mégalo : j’aimerais au mieux devenir quelqu’un de normal…

Propos recueillis par et

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