Avec 99 cents, les COS marient énergie punk, efficacité electro et discours post-situ. Mail-interview avec Alex Murray-Leslie, une des trois têtes de la trinité electro panchicks. Votez pour elles.

Chronic’art : On vous associe souvent à un courant post-punk ou « electro-punk »… Qu’en pensez-vous ?

Chicks On Speed : Hé bien, nous somme flattées d’être sur une compilation Rough Trade, mais le terme est un peu plat : « post-ceci », « post-cela »… Allez au bureau de poste (« go to the post-office! ») ! Les punks ne faisaient que se rebeller contre les hippies. Nous sommes beaucoup plus hardcore que ça… Ce qui ne nous empêche pas d’aimer la musique punk : The Shaggs, The Slits, Yoko Ono, Kleenex, Lilli Put, Raincoats, Malaria, Ideal, DAF Tracey and the Plastics, Kevin Blechdom, Le Tigre, Angie Reed, Peaches, Tribe 8, Robots in Disguise, The Knife, Revlon 9…

Politiquement, vous vous situez entre libéralisme et attitude punk ?

Nous changeons tout le temps d’avis. Regardons les choses en face : est-ce qu’on a le choix ? Nous changeons de point de vue sur les choses de manière à avoir le choix. Liberté !

Le punk a juste été une mode, mais il aurait pu être beaucoup plus que ça. Des caractères comme Malcom McLaren, et son punk préemballé, n’ont rien à voir avec nous. Nous nous sentons beaucoup plus proches des origines historiques du punk, le situationnisme (les projets architecturaux utopiques de Constant) ou les performances Fluxus : le « Flushing the toilet » de Yoko Ono, la « Guitar Piece » de Robin Page, l’idée générale de « box set » très utilisée par les artistes Fluxus. Nous croyons à l’idée de communauté artistique, aux collaborations. Les écoles d’art apprennent à être ego-maniaques, à développer un « style » toujours identifiable, nous voudrions nous rebeller contre cette tradition conceptuelle de l’artiste en héros. Les pionniers sont toujours plus intéressants que leurs imitateurs. C’est pareil aujourd’hui, avec la bastardisation du mouvement riot grrls.

Quelles seraient vos propositions économiques et sociales ?

Nous croyons au commerce équitable et nous ne voulons pas faire partie d’un système capitaliste qui fait des tonnes et des tonnes d’argent de manière abusive. Nous voulons construire nous-mêmes notre business et nous mettre en compétition avec le big-business et la globalisation en soutenant les gens autour de nous : jeunes designers, réalisateurs, musiciens, etc. C’est un investissement sur la créativité en même temps que la construction d’une communauté : donner du travail à nos amis pour faire de belles choses. Il ne faut pas oublier que la liberté économique est une belle chose : créer des emplois créatifs pour que les gens ne soient pas obligés d’aller bosser chez MacDo. Tout le monde devrait se lancer dans le bon business. Ce sera profitable au consommateur autant qu’au producteur. Il s’agit juste de découvrir la liberté que nous avons, qui n’est pas toujours accessible, de proposer de beaux et bons produits aux gens. La subversion est un bon outil, si elle est mariée à la créativité. Nous construisons notre propre plate-forme et n’avons besoin de personne d’autres que nous-mêmes.

Vous pouvez développer les idées présentées dans votre disque ?

99 cents parle des produits de consommation et est lui-même un produit de consommation, il parle d’un sujet et est lui-même le sujet de ce dont il parle. Dans le détail : Sell-out utilise les moyens narratifs des mass-medias pour explorer les significations et mécanismes du médium lui-même, créant un dialogue de manière à mieux comprendre la société dans laquelle on vit aujourd’hui. Coventry est une ballade à propos d’amis. Universal pussy raconte le désordre psychologique dans lequel nous nous sommes trouvées après avoir signé notre chanson Kaltes Klares Wasser en licence chez Universal. C’est une chanson en colère, que nous avions besoin de sortir, je crois.
Love life est une chanson pop cliché. Nous la voulions très tendre et naïve. Cela faisait longtemps que nous voulions sortir quelque chose comme ça. Nous espérons en faire un tube des radios mainstream, qui s’infiltrera partout comme un virus… Miss Kittin a écrit Shick shaving pour nous. Elle croyait au début que notre nom s’écrivait « Shick », comme les rasoirs, elle nous a envoyé la chanson qui nous a plu, et c’est elle-même qui l’a chantée. We don’t play guitars : nous en avions assez de ces groupes de branleurs à guitares en têtes d’affiche des festivals rock. Pourquoi pas la musique électronique ? Pourquoi pas de la bonne musique ? Ce morceau est un hymne célébrant la bonne musique électronique d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Un morceau de musique électronique sur lequel on peut pogoter. Wordy rappinghood est un classique de Tom Tom Club. Tina Weymouth est une fan de notre musique et elle aimait bien l’idée que nous en fassions une cover. Elle a accepté de participer aux vocals, avec Miss Kittin, Nicola d’Adult, Acid Maria , les filles de Le Tigre, Soffie O, Jill Mingo et Kevin Blechdom !

Peut-être que vous êtes « post-punk » dans ce sens que vous utilisez tous les moyens contemporains pour un discours subversif ?

Je te répondrai avec les paroles de notre prochaine chanson, Disgraceland !, que nous enregistrons en ce moment avec Dave Clark :

« Someone asked me yesterday,
About the history of pop !
What´s it all about ? It’s all about what ?!

The sound of the city collapsing
Give me something new in rock and roll

Punk with out pogo !
I want to be terrible too
White shirt, black pants skinny tie,
Cultural icon suburban teen riot, cliche

Disgraceland
Autocratic taskmaster
This is just a pop song, a would be, has been
Hit record , a cheap commodity
And Johnny Rotten is nobody
What was it all about ?
Disgraceland
Wrecker of civilization, and you make music
We are famous and we haven’t even sold one record
Takeout your encyclopedia
You don’t like monday, well I hate sunday’s
What’s it all about its all about what
Disgraceland

Are you punk, self taught DIY ?
Or new wave, musically comprised of
Shitty theoretical pop song drenched la-las
Supported by major label hype
Disgraceland

I took a spin on the celebrity couch
Ah, yes, we improvise always on stage,
Press press, test press, feed the frenzy,
We want to make you feel uncomfortable
Babylon is burning, another record mogel is earning

The most outreageous, brilliant, controversial, scandalous
And extraordinary, pop star of our time, we own you !
Going after the money, in the land of milk and…

DISGRACELAND

The desire begins with the demand to live
Not as an object, but as a subject of history
They were terrible, i thought they were great !
I want to be terrible too !

So what kind of trouble can i get into ?
Don´t do it yourself, but with everybody else!
Megalomanic, power trips, complete control,
Wake-up, learn techniques to unlearn,
Build it up, smash it down, fuck the pain away !

A song based on nothing, wonder of wonders,
Rhythms international, the world is nothing and we make the music
I hurl my song at the world, this IS actually happening, this is not yesterday !
Music seeks to change life, life goes on, the music is left behind…
And this is the end of this song !
A song based on nothing, wonder of wonders,
Rhythms international,

The world is nothing and we make the music
Vous pensez que l’utilisation des moyens donnés par la société capitaliste aujourd’hui peut permettre une libération ? Certaines chansons donnent l’impression qu’il faut pousser à l’extrême les structures économiques actuelles pour s’en libérer.

Nous croyons pouvoir faire du monde un endroit meilleur. Nous nous considérons comme des sortes de travailleurs sociaux, dévoués à l’entertainment. Nous ne prédéterminons pas le bonheur à travers un relais que nous ferions des structures sociales actuelles pour autant. Nous faisons ce qui nous rend heureuses, et en retour, nous rendons d’autre gens heureux. Nous voudrions plutôt briser les prédéterminations actuelles.

Vous avez plusieurs morceaux féministes…

La publicité, surtout en Europe, transforme les femmes en objets sexuels pour vendre des shampoings. A travers ces publicités sexistes et ignorantes, la femme ne peut être sérieusement considérée comme l’égale de l’homme. Le respect de la personne humaine n’est même pas présent. Nous voulons juste l’égalité sociale, que les femmes soient payées aux mêmes salaires que les hommes. En Occident, les femmes ne sont pas égales économiquement aux hommes, et dans la plupart des pays du tiers-monde, elles ne sont définitivement pas considérées sur le même plan, à tous les niveaux. Ceci dit, les femmes ne doivent pas imiter les hommes.

On a pourtant parfois l’impression que les femmes, ou du moins une certaine image de la féminité, a déjà un énorme pouvoir, à travers justement les stéréotypes de la féminité (une société protectrice, enveloppante, noosienne, sensuelle), qu’en pensez-vous ?

Je me permets de te répondre par un copier-coller de ces documents statistiques, qui me semblent explicites :

« The Wage Gap Persists

* In 2002, women earned 76% as much as men. For women of color, the gap was wider. African American women earned 67%, and Latina women 55%, of men’s weekly earnings. While Asian Pacific American women do better, they still earn 83,5% as much as men.

* The gap between the wages of men and women is larger in the U.S. than in Germany, Britain, France, Norway, Denmark, Sweden, and New Zealand.

* America’s working families lose $ 200 billion of income annually to the wage gap – an average loss of more than $ 4 000 each for working women’s families every year because of unequal pay.

* Equal pay is a problem in every occupational category :

* In 2002, professional women earned almost 26% less than male professionals ;

* Female technicians earned almost 30% less than their male counterparts ;

* Female administrative support (including clerical) workers earned 17% less than those who were male ;

* Female sales workers earned 41% less than similarly employed men, while women in service occupations earned 24% less than men in service occupations.

* More specifically, in 2002 :

* Female college and university teachers earned 22% less than those who were male ;

* Female physicians earned a whopping 41% less than those who were male ;

* Female editors and reporters earned more than 14% less than those who were male ;

* Female lawyers earned 23% less than male lawyers ; and

* Female computer systems analysts and scientists earned 18% less than similarly employed men.

* The wage gap exists even in occupations where women considerably outnumber men. In 2002 :

* Female teachers (excluding college and university faculty) earned 13% less than similarly employed men ;

* Female nurses earned 10% less than their male colleagues ; and

* Female psychologists earned 25% less than male psychologists.

* For full-time workers aged 25 and older in 2001:

* The median income of a female high school graduate was more than 26% less than that of her male counterpart ;

* The median income of a women with a bachelor’s degree was over 25% (or $ 13 243) less than that of a similarly qualified man ;

* A women with a master’s degree earned 28% (or $ 18 591) less than a man with a master’s degree ;

* The median annual income of a woman with a professional degree was 40% (or $ 39 907) less than that of her male counterpart ; and

* A woman with a doctoral degree earned more than 25% (or $ 20 652) less than a similarly qualified man.

* Because women are paid less when they work, they receive smaller pensions (and Social Security checks) when they retire. In 2000, half of all older women received a private pension of less than $ 4 164 per year, compared with $ 7 768 for older men.

(Source : http://www.dpeaflcio.org/policy)

Propos recueillis par

Lire notre chronique de 99 cents.
Voir le site officiel des Chicks On Speed