The Cycle of days and seasons vient compléter la longue série de disques déjà à l’actif des frères Adams, qui, sous l’appellation de Hood et, en compagnie d’un personnel de taille variable, débitent dans leur coin leur forme de post-rock. Après une enfance passée à se battre à coups de marteau, ces quasi-frères ennemis savent faire preuve de complicité pour parler musique, fans dérangés et… musique encore.


Chronic’art : Comment travaille-t-on entre frères ?

Richard Adams : Sans ce groupe, nous n’aurions rien à faire ensemble.

Chris Adams : Nos relations en sont à ce point (rires).

Richard : Durant notre enfance, il y avait des moments où l’on s’entendait vraiment bien. Je me souviens de l’avoir frappé à coups de marteau quand j’avais 6 ou 7 ans…

Chris : Après cet incident, je n’ai plus jamais été le même.

Et où avez-vous grandi ?

Richard : Weatherby, près de Leeds. Aujourd’hui, nous vivons à Leeds, nous avons déménagé vers la Grande Ville.

Chris : Nous n’avions plus assez de distractions. Il nous fallait l’agitation urbaine.

La génèse du premier disque.

Richard : On jouait, enfin on bricolait de la musique. Et ce, du plus loin que je me souvienne. On avait ce petit orgue sur lequel on ne faisait rien de très bon ou de très évolué. Plus vieux, on a eu des guitares qui nous permettaient de produire plus de bruit. Cependant, nous n’avons jamais été conventionnels au point de jouer dans des groupes de lycée.

Chris : En réalité, on bidouillait nos instruments et boum ! on a sorti un disque. Les choses sont arrivées par accident. Quelqu’un nous a dit qu’il montait un label et nous a proposé d’enregistrer un single.

Richard : On passait par là au bon moment.

Chris : Malheureusement, certaines personnes font de la bonne musique mais ignorent qu’ils peuvent sortir un disque. En général, ils se demandent ce qu’on va penser d’eux, s’ils vont avoir du succès ou non… Si on commence à se soucier de ce genre de truc, on est foutu. Le monde est vaste et de toutes façons, il y en aura toujours pour critiquer.

Richard : Nous, par exemple, on sort des disques pour nos 10 fans et tout baigne.

J’aurais cru que vous en aviez au moins 20. Comment a été enregistré ce nouvel album ?

Richard : En deux semaines. On est entrés en studio avec deux ou trois idées. L’enregistrement s’est déroulé de manière chaotique alors qu’on faisait tout notre possible pour que ça se déroule bien.

Chris : Les désastres principaux venaient de nos équipements… mais de nous aussi quelquefois. On était sous pression, on pensait trop à ce disque.

Vous semblez très productifs, entre vos à-côtés de Hood, votre multitude de split singles. Besoin de créer ou de gagner votre vie ?

Richard : On ressent un réel besoin de créer. On a tendance à sortir une grosse proportion de notre production. Parfois, on nous propose une collaboration, et même si cela nous contraint à bosser différemment, on accepte. Beaucoup enregistrer permet de « photographier » notre évolution, de réaliser un documentaire sonore en quelque sorte. Cependant, nous ne sommes pas impliqués dans un si grand nombre de projets parallèles. On bosse avec pas mal de gens, soit, car on a tendance à parfois « emprunter » des membres d’autres groupes, afin qu’ils nous aident un peu.

Chris : Quant aux autres membres du groupe, Hood ne les occupe pas à 100%. Ils ont du temps libre pour aller expérimenter ailleurs. Quand on regarde notre album précédent, on a l’impression que sept groupes ont joué dessus. Et qu’on était le centre et la cause de cette agitation.

Combien de personnes fixes au sein de Hood ?

Richard : Quatre. Il y a aussi tous ces membres périphériques qui passent de temps à autre. Nous sommes six sur l’album et quatre sur scène.

Si vous deviez définir votre style, qu’en serait-il ?

Chris : Faire de la nouveauté à l’ancienne.

Richard : Absolument.

Chris : Nous n’essayons pas d’être complètement post-rock, comme ces groupes qui croient pouvoir modeler le rock du futur, deviner son évolution. On tente juste de faire de l’expérimental prudent, avec des guitares. A la limite, on pourrait baptiser notre genre l’ »anything goes music ».

Quel disque de Hood préférez-vous ?

Chris : Le nouveau. Lecteurs, allez l’acheter ! Je ne sais pas vraiment. Le premier single peut-être et le premier LP. De grands moments pour nous, en tous cas. J’aime tous nos disques, ils ont tous leur charme et leur caractère. Ils résument tous une étape de notre vie, ressuscitent des souvenirs lorsqu’on les réécoute.

Richard : Je peine à réécouter certaines chansons à cause de leur contenu émotionnel, à cause des tranches de vie qui leur sont liées.

Votre pire ou meilleure anecdote scénique ?

Richard : En raconter une hors de son contexte sera moins dérangeant que ce qu’on a vécu. J’ai envie de faire ressentir aux lecteurs toute l’horreur de l’événement. Oh, il y a eu ce show en Suisse l’an dernier. Nous avons débarqué sur le lieu d’un festival, au milieu de nulle part. Il n’y avait rigoureusement rien aux alentours. Et pas un chat sur le site.

Chris : Avant de monter sur scène, on se disait qu’il n’y aurait personne. Et nous avions raison.

Richard : Il était 17 ou 18 heures, personne ne s’était déplacé. A part nous et quelques groupes locaux programmés ce jour-là. C’était assez effrayant de se retrouver dans ce trou, sans quoi que ce soit autour, sans public…

Une sorte d’avant-goût de l’apocalypse…

Richard : D’autant plus qu’il neigeait.

Chris : Sans compter que certains de nos fans sont absolument terrifiants. Il y a ce type qui m’espionne quand je me rends au supermarché.

Ce doit être inconfortable.

Chris : D’autant que j’achète des produits embarrassants. Toutes sortes de crèmes pour la peau, contre les champignons, etc. Maintenant, le monde entier est au courant de mes petites misères ! (rires)

Richard : On vient d’être connecté à Internet et on y a trouvé des trucs bizarres.

Chris : C’est gênant de lire ce qu’on écrit sur nous. Ça me met mal à l’aise.

Richard : J’ai été terrorisé par un site américain, tenu par un type totalement obsédé par le groupe. Il raconte des choses très détaillées à notre sujet. Il y a aussi des rumeurs passionnantes qui courent sur Hood. On raconte souvent qu’on a déménagé à Bristol.

Si on parlait de la chanson Hood is finished ? Un moment de dépression ?

Richard : Je n’arrive pas à me souvenir de ce qui s’est passé, excepté que je devais traverser une phase de frustration.

Chris : Les gens prennent cette chanson littéralement. On n’a pas fini d’entendre courir les rumeurs.

Richard : J’aime de temps en temps être auto-référentiel, qu’on mentionne Hood dans les paroles. Le public trouve ça intéressant, a l’impression qu’on lui donne un petit quelque chose en plus. Sans être trop personnel. Je n’aurais jamais pu écrire un truc comme le dernier Blur, sur lequel Albarn raconte sa rupture. D’ici quelques années, il va regretter amèrement de s’être autant dévoilé.

Comment vous occupez-vous en dehors de Hood ?

Richard : On a des boulots réguliers (air lugubre). On jongle entre les deux avec difficulté. On n’arrive jamais à se reposer, à se libérer l’esprit.

Chris : D’un autre côté, ça nous motive. Comme on a des jobs infects -des emplois de bureau très ennuyeux-, on a vraiment envie de faire autre chose à côté.

Richard : Au moins, on dispose des week-ends et des soirées pour jouer.

Chris : Personne ne réalise que la musique ne nourrit pas son homme. Dès qu’on a de l’argent, on le réinvestit en matériel.

Richard : Un de mes collègues, qui est devenu fan et ami, a fini par faire la bave, raconter que je faisais partie d’un groupe. Ce qui m’embarrassait, mais dans un sens, cela expliquait mes nombreuses absences. On ne se demande plus si j’ai disparu.

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