Depuis douze ans, le Festival Premiers plans à Angers met en compétition des cinéastes venus des quatre coins de l’Europe pour présenter leurs premiers courts ou longs métrages…

C’est également l’occasion exceptionnelle de découvrir de nombreux films d’école de cinéma. Cette année, les Danois se sont particulièrement détachés d’une programmation hétéroclite, qu’il s’agisse de Peter Schonau Fog et son très épuré Lille Maensk (Prix laser vidéo titres), de Dagur Kari, auteur du plus sophistiqué Lost week-end (Grand Prix du jury et Prix des étudiants d’Angers). Ou encore de Siri Melchior, « exilée » à Londres pour ses études à l’école des Beaux-Arts, qui a réalisé un film d’animation naïf et cruel à la fois, Passport.
Lille Maensk (« Petit homme ») témoigne d’une grande maîtrise dans la narration (un jeune homme, emprisonné pour l’homicide involontaire d’un enfant, tente à tout prix lors d’une permission de regagner son village malgré le refus de ses habitants). La mise en scène n’est pas sans rappeler les élans généreux de la caméra de Breaking the waves. Lost week-end, hanté par la musique de Radiohead, plonge son héros, Emil, DJ soûlé de vie nocturne, dans un hôtel qui pourrait être l’antichambre de la mort… Des lumières agressives, une atmosphère et des personnages étranges restituent avec force les hallucinations d’Emil. Enfin, Passport illustre de façon poignante le destin d’une famille immigrée dont les rêves sont brisés par la trahison d’un homme sans scrupules.

Comme on peut le voir, les thèmes de l’exil, du déracinement, de l’absence de repères dans un monde hostile ou inconnu ont traversé l’ensemble du festival, parfois avec légèreté (le burlesque Tipota de Fabrizio Bentivoglio), de façon provocante (le très discursif Soins et beauté d’Alejandra Rojo) ou encore avec gravité (le mélodramatique Solas de Benito Zambrano – Prix du public pour le long métrage). Mais à Angers, on peut aussi fermer les yeux et se faire son cinéma dans sa tête… Cette année, André Delvaux, le plus grand cinéaste belge, Agnès Varda, la « grand-mère de la Nouvelle Vague » et les frères Dardenne, dernière Palme d’or à Cannes pour Rosetta nous donnaient des « leçons de cinéma ». Leurs expériences et leurs anecdotes de tournage ont mis en évidence qu’il existait des rapprochements a priori inattendus dans leurs méthodes de travail. Agnès Varda et Luc et Jean-Pierre Dardenne évoquaient ainsi l’ambiance très tendue qu’ils ont fait régner sur les plateaux de Sans toit ni loi comme de Rosetta. Difficiles conditions de travail pour Sandrine Bonnaire et Emilie Dequenne : celles-ci devaient effectivement se fondre dans la peau de personnages de jeunes femmes seules et butées…

Les lectures publiques de scénarios de longs métrages (en cours de production) ont d’autre part permis à des comédiens de réaliser de véritables performances. Cette année, Dominique Blanc et Amalia Escriva, scénariste d’Avec tout mon amour, obtiennent le Prix du public. L’actrice à la lecture inspirée et convaincante était cette année en compétition avec la partition à deux voix de Chad Chenouga et Lysiane Meis (Mes fantômes de Chad Chenouga et Philippe Donzelot), Marie Trintignant (La Suédoise de Jean-Baptiste Huber et Gladys Marciano), Lambert Wilson (L’Ogre de Ménilmontant d’Emmanuel Ortner) et Karin Viard (Carnages de Delphine Gleize).
Ouverture sur la création cinématographique mais aussi scène unique pour des initiatives originales, comme ces lectures dont l’audience grandit chaque année… Le Festival Premiers Plans mérite décidément un éclairage médiatique plus important.

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