A l’ouest, enfin du renouveau! Lui, c’est Paco, solide espagnol qui plaît aux femmes et lui, c’est Nino, émigré russe chétif qui aimerait bien plaire à une femme. Le premier est un VRP effacé et le second un vagabond trublion. Le premier et le second se rencontrent, se quittent et se retrouvent. Le tout est un road-movie d’aujourd’hui dans la Bretagne bretonnante, filmé en cinémascope. Tout commence par effraction et tout s’achève dans la confusion. Paco ou le syndrome de l’auto-stoppeur.

Attiré par une superbe créature, le pouce levé à la sortie d’un village, Paco, pourtant pressé, lui fait signe de monter. Mais là, la belle s’efface et offre sa place à Nino, le type obscur et louche que Paco avait soigneusement évité 100 mètres auparavant. Tout est dit. Paco et Nino forment dès lors un nouveau duo, où l’un est aussi prolixe que l’autre se montre peu disert, où la placidité du premier tranche avec la fébrilité du second. Principe des contraires. Nino va même à la faveur d’une panne imaginaire jusqu’à « emprunter » la voiture de Paco, lequel le retrouvera par hasard quelques jours plus tard en train de déambuler négligemment le long d’un port. Entre temps, Paco aura rencontré l’amour, avec Marinette, et Nino, lui, aura une nouvelle fois échoué dans ses entreprises de séducteur.

Bien sûr, le duo devient rapidement inséparable : Nino et Paco se réconcilient à l’hôpital où ce dernier a été envoyé pour avoir « emprunté » ladite voiture. Bien sûr, le duo devient infréquentable : Nino manque d’amputer la jambe de Paco à coup de tronçonneuse. Bien sûr, le duo devient irrésistible : il faut avoir vu la séquence du vrai-faux sondage amoureux organisé dans un petit village breton et destiné à repérer à travers des questions plus vraiment anonymes les éventuelles conquêtes de Nino.

Pourtant, pour son cinquième long métrage, Manuel Poirier vient de repousser les frontières du genre, entre le port de Guilvinec et la pointe du Finistère. Loin des figures convenues d’un certain cinéma français actuel (pseudo chic et intello), Manuel Poirier signe là un film atypique. Le plus abouti sans doute. Le plus personnel aussi.  » Quand j’écris, je finis par ne plus savoir où démarre et où finit mon imaginaire, et c’est pour cela que mes films sont proches d’une histoire qui est peut -être la mienne ou celle d’autre personnes, peu importe, mais avec, si possible, une vision poétique « .

La poésie affleure en permanence dans les rapports entre Paco et Nino, entre le cinéaste et la région. Des plans simples et beaux fixent le souvenir comme celui où Nino, éperdu de bonheur après avoir – enfin – rencontré l’âme sœur, réconforte maladroitement mais si sincèrement Paco, abandonné par Marinette. Avec Western, on est très loin du road-movie à la Sailor et Lula ou à la Thelma et Louise. La caméra est humble, le dialogue juste, les acteurs épatants. A l’Ouest, décidément, tout est nouveau.