Very bad trip 2 commence pile poil là où débute Very bad trip : au bord du trou noir d’où la bande de noceurs s’est extraite depuis quelques heures. Sauf que Bradley Cooper, au téléphone, annonce à la future mariée que cette fois, c’est encore plus grave. Il n’a pas tort : Very bad trip 2 décuple les proportions beaufisantes du premier épisode avec une vigueur et une détermination pour le moins monstrueuses, un peu comme si ce film était la version « Incroyable Hulk » du précédent : on reconnaît les traits, la nature du concept, on devine sa trajectoire humoristique, mais en dégénérant, un de ses attributs fait dériver tout le reste.

De Las Vegas, le concept est délocalisé à Bangkok, déplacement géographique pas anodin, puisque du temple de la débauche intrinsèquement ricaine, c’est le rapport du touriste vulgaire à l’étranger qu’on met en scène ici, non sans complaisance braillarde. Du gang de mâles blancs consommateurs, c’est le dentiste un peu coincé (Ed Helms) qui s’apprête à se marier et de facto se fader sa belle-famille castratrice – d’un côté, un pater asiatique terrifiant (plutôt drôle), de l’autre son jeune fils, petit génie coincé dont les trois clampins, au bout de leur défonce, ont perdu la trace dans les rues de Bangkok.

Une nouvelle enquête s’ouvre donc suivant les grandes lignes de la précédente : désembuer la mémoire à partir des indices retrouvés post beuverie. L’efficacité De Palmienne du concept a beau résister un temps à sa propre mécanisation, le film baisse rapidement les armes : plutôt de foncer tête baissée dans l’inconnu, on s’escrime ici à reproduire une recette éprouvée avec un pointillisme dévitalisant. Cette sclérose ne gagne pas seulement l’intrigue, mais surtout les personnages, pures marionnettes cantonnées à balancer leurs vannes dans un tempo qui a plus à voir avec le travail à la chaîne qu’avec une réelle rigueur comique. Jadis inquiétant parce qu’imprévisible, le geek psychopathe qu’incarne Zack Galifianakis s’apparente à un mauvais sosie à qui l’on interdit le moindre élan créatif, la moindre évolution. C’est encore plus criant avec le personnage de Doug, l’ami disparu du premier film, que le scénario laisse sans aucune raison en marge du bad trip de ses copains : ce qui marche pour trois ne pourra jamais fonctionner pour quatre. Bonjour la souplesse.

Ce dessèchement classique, le film le compense par une surenchère trash. Par exemple, ce doigt coupé que la bande retrouve en sortant du coltard et qu’elle assimile à leur compère disparu. Mais la mutilation ne provoque qu’un gag : on laisse un petit singe jouer avec l’annulaire pourrissant, on pousse quelques cris, puis le doigt disparaît sans préoccuper personne. C’est que le film est moins cruel qu’épouvantablement désinvolte, reprenant à son compte la foi en les rites de bizutage qui forgent le caractère et la virilité (le beau-père finalement fier de son gendre), voire l’impunité et les fantasmes du touriste beauf : la petite bite des asiatiques, la grosse des transsexuels dans les salons de massage, la zénitude des moines bouddhistes qu’on instrumentalise jusqu’au bout de l’horreur, juste pour rire. Sommet : la bouteille d’eau glissée par Galifianakis sous la robe d’un vieux moine bouddhiste en guise de membre turgescent, provoque l’hilarité d’un bus rempli de thaïs – victime comprise. Ce qui fait dire à Galifianakis qu’un gag pareil est universellement drôle. Ben voyons.