Trente minutes se sont à peine écoulées et déjà Catherine Banning (Rene Russo), la détective chargée d’enquêter sur le vol d’un Monet dans un musée new-yorkais, retrouve le tableau chez Thomas Crown (Pierce Brosnan). Quoi, c’est déjà fini ? Le milliardaire, voleur à ses heures, serait-il beaucoup moins malin que dans la version de Norman Jewison (1968) ? Rassurez-vous, le jeu du chat et de la souris entre les deux héros se prolongera encore pendant plus d’une heure. Le tableau n’est qu’un leurre, un faux confectionné par Thomas Crown pour se moquer de l’enquêtrice qui le soupçonne, à juste titre, d’avoir dérobé l’original. Cette copie est à l’image du remake de John McTiernan. Effectuée par un bon professionnel, elle ne se distingue que très peu de l’original. Son existence n’a donc aucune raison d’être, le tableau ayant été déjà peint par un autre. Lorsqu’en plus l’œuvre d’origine est loin de figurer parmi les chefs-d’œuvre, cela donne tout simplement deux tableaux et deux films qui ne changeront rien à l’histoire de l’art.

Rétrospectivement, le film de Jewison dégage encore un certain charme en raison de son esthétique un peu datée (voir la pléthore de split-screen) et de la musique signée par Michel Legrand. Mais un milliardaire qui s’ennuie et qui organise des casses pour soigner son mal-être existentiel n’a jamais passionné les foules -il aurait même plutôt tendance à les agacer. La nostalgie ne doit pas cependant nous conduire à surévaluer un film qui demeure superficiel, et ne se démarque aucunement de la production commerciale de l’époque. Mc Tiernan fait de même : en bon copiste, il réalise également un film commercial assez plaisant, avec quelques rebondissements scénaristiques pour tenir le spectateur en haleine. Le couple Brosnan-Russo est suffisamment charismatique pour prendre la relève des interprètes originels, Steve McQueen et Faye Dunaway.

Bref, il n’y a pas de quoi hurler à la trahison car ce genre de jugement n’a pas vraiment lieu d’être en matière de cinéma de divertissement. L’existence du second nous conduit à une seule interrogation : les scénaristes hollywoodiens manquent-ils à ce point d’imagination ? Le fait de racler les fonds de tiroirs et de parier sur l’absence de culture cinéphilique du spectateur n’est pas vraiment un signe de renouvellement.