Dans ce festival de torses et de nombrils mouillés que nous offre Street dance 2, on n’est pas ailleurs que dans la boulimie clipesque, constamment suspendus à l’attente de la danse qui arrive. C’est dans cette optique du « clip d’après » que le film se regarde et s’apprécie, et difficilement autrement. Ici le concept de la franchise britannique (la concurrente américaine s’appelle Sexy dance) reste le même : la street dance ramenant à elle et avalant toutes les autres danses, le premier volet était dédié à la fusion de la danse classique et de la danse de rue, celui-ci frotte l’une contre l’autre la street dance et la danse latino.

Et si le film se veut une succession clipesque, c’est qu’il ne prétend pas à autre chose qu’à filmer de jeunes gens qui dansent, ni plus ni moins, en suivant l’indigence béate de son scénario – là où Pina de Wenders pêchait par excès d’auteurisme (une sorte de Mystère Picasso de la danse qui succombait à la tentation de l’interview oiseuse), Street dance pêche dans les termes de sa catégorie de film pour groupe de copines et s’engouffre sans hésitation dans la mièvrerie acidulée faisant s’amasser autour d’un fil pour le moins ténu la chair moite des chorégraphies. Eddie, le héros, rassemble les meilleurs danseurs du monde dans le but de prendre sa revanche lors de la battle du siècle. D’ailleurs ce projet se révèle réel : les membres du groupe ont été ramassés dans tous les pays cités et sont quasiment tous des champions du monde dans leur discipline.

C’est dans cet emboîtement du réel et de la fiction que le film se désenglue de sa sirupeuse matière première : tous ces acteurs sont obligés de camper la mièvrerie absolue de l’amourette pré-ado mais, dès lors qu’ils entrent dans la danse, ne peuvent pas cacher plus longtemps l’intelligence de leurs corps adultes, ciselés par des mois d’entraînement et de concentration. Quant à la 3D, elle est ici pour servir l’acuité du sensuel, elle est à hauteur de corps : décollement des chairs, roulement des muscles, goutte de transpiration, ruissellement des chevelures, batailles de plumes et de pop-corn.

Frôlant parfois le vide serein de la pub pour gel douche Tahiti, Street dance emprunte les raccourcis scénaristiques que la mythologie du clip lui permet. Soit : remplacer une série d’états d’âme par une série de climats, d’attitudes prémâchées (danse solitaire et torturée sur un ring, tango enflammé, drague dans une allée résidentielle où le garçon marche derrière la fille qui lui envoie des regards méprisants) favorisant des accélérations narratives où le gros bloc de sentiment s’articule et se dégrossit toujours dans les termes de la danse et l’efficacité bourrine du stéréotype. Mais cette façon de saturer l’espace de danses révèle autre chose qu’une heureuse volonté de vider le film de danse de ce qui ne le regarde pas : un culte de la performance et du surpassement tendance pub Nike, un perfectionnisme joyeusement cantonné au corps.