Malak, une chanteuse et actrice adulée par son public, devient la maîtresse de Lamei, un jeune arriviste qui profite de l’influence et de la célébrité de celle-ci pour gagner à son tour ses galons de vedette égyptienne… La famille et les amis de la star tenteront l’impossible pour déjouer les plans du faux derche. Les films de Chahine se suivent et se ressemblent. Des larmes et des chansons, du soleil et du kitsch, des passions et du militantisme. A chaque fois, c’est la même histoire, les sages et les justes d’un côté, les intégristes et mécréants de l’autre, le tout sous un déluge de musique populaire et de sentiments naïfs. Silence… on tourne ne faillit pas à la règle et ravit d’abord par cette familiarité immédiate avec son spectateur, sa façon d’installer, dès sa première séquence, un univers connu et reconnu. Rien de tel qu’un concert comme entrée en matière, un show émouvant au sein duquel les paroles de Malak annoncent déjà moult micro-mélos et embrasements amoureux. Mais ces belles prémices n’aboutissent pas à la catharsis lyrique attendue.

En déroulant son récit avec un flagrant manque d’inspiration, Chahine laisse éclater au grand jour les défauts de son cinéma : personnages prévisibles, facilités scénaristiques, et, surtout, pauvreté visuelle. Loin de la grâce du Destin, l’entrain des acteurs et l’énergie des séquences musicales (sans doute les plus réussies) ne parviennent que rarement à compenser les carences de la mise en scène, presque aussi plate que dans une quelconque sitcom orientale, et parsemée ci et là d’effets numériques d’un goût douteux. Entre l’ambition démesurée d’un musical flamboyant et une inventivité degré zéro, l’auteur de L’Autre défait comme il peut les nœuds d’une intrigue laborieuse à coups d’imbroglios paresseux et d’euphories au rabais. Résultat : l’alchimie chahinienne, qui parvient si souvent à transformer le plomb en or et les tissus Tati en robes de princesse, ne prend pas. Sans être déshonorant, Silence… on tourne peine à tenir ses promesses de dessert gras et sucré, nous laissant sur notre faim alors qu’on réclamait l’indigestion.