Suite de la collection « les introuvables » de Wild Side, avec deux oeuvres de Samuel Fuller. Cette fois le mot « introuvable » est un peu excessif, puisque les deux films proposés, réalisés consécutivement –Shock corridor (1963) et The Naked kiss (1964)- comptent parmi les plus fameux du cinéaste-revolver. De The Naked kiss, on connaît surtout la célèbre et sidérante ouverture du film, où l’héroïne, Kelly, frappe un client ivre qui refuse de la payer. Dans la bagarre sur fond de jazz, il lui arrache sa perruque, découvrant un crâne chauve et luisant -grande déflagration de violence hystérique qui ouvre sur un tourmenté mélo sur la rédemption d’une femme et la corruption des notables. Shock corridor, lui, demeure l’un des films les plus connus de Fuller, avec Forty guns et The Big red one : pour résoudre un crime et obtenir le prix Pulitzer, un journaliste se fait passer pour fou et intègre un asile-réceptacle de tous les maux américains dont il ne sortira jamais. A l’image de l’essentiel de sa filmographie, Shock corridor et The Naked kiss sont deux films de la conséquence, de l’après, qui ne renoncent jamais à la précision. Double élan qui se coule dans la vie même du cinéaste : d’un côté sa formation (à l’ancienne) de journaliste, de l’autre son expérience de la guerre et de la difficulté à surmonter les traumas (il fut notamment l’un des premiers témoins de la libération des camps par les alliés).

Du côté des bonus, qui occupent un des trois DVD de cet élégant coffret, à voir en priorité un petit film de 26 minutes au cours duquel Tim Robbins, Quentin Tarantino, Jim Jarmusch et Martin Scorsese racontent leur amour pour le cinéaste à l’éternel cigare. Si Scorsese et Jarmusch parlent depuis le lieu classique de l’interview-bonus (qui assis sur un siège de salle de cinéma, qui à son bureau), Tim Robbins et Tarantino sont en vadrouille : l’acteur va retrouver dans son exil parisien un Fuller toujours bavard, chaleureux (il pose sa main sur celle de Robbins, comme un grand-père annonçant une anecdote) et vif comme tout, puis entreprend, en compagnie de Tarantino, de fouiner dans la cave au trésor de la maison américaine que Fuller a laissée telle quelle en partant pour la France. Il faut voir ces deux galopins farfouillant tout excités parmi les cartons, les papiers et les souvenirs d’un vieux filmmaker qui, lors de son célèbre caméo dans Pierrot le fou de son admirateur Godard, définissait le cinéma comme un champ de bataille.