Dans la bourre que se tirent les gros studios hollywoodiens pour devenir les nouveaux maîtres du cinéma d’animation, Blue sky, chaperonné par la 20th Century Fox a pris un petit avantage sur les films conçus chez Dreamworks (Shrek). Visuellement, Robots est aussi impressionnant que les monuments issus de chez Pixar (Monstres & cie, Nemo…). Chose assez inattendue après la laideur formelle de L’Age de glace, précédent opus Blue sky. Dans Robots, on ne sait plus où donner des yeux tant la texture des personnages métalliques où les décors tentaculaires d’une mégalopole sont somptueux. Mais ce sens du visuel s’avére très vite un trompe-l’oeil dès lors qu’il s’agit de placer des enjeux narratifs. Le scénario du film est en effet un peu rouillé : fable initiatique sans surprise, personnages archétypaux jusqu’au monolithique, recours à des intermèdes musicaux ou des scènes de grand-huit dès que le récit tombe en panne… Des rouages rôdés depuis la préhistoire de Disney.

Magnifique formellement, Robots ressemble néanmoins souvent plus à la démo de son adaptation en jeu vidéo, qui ne devrait pas manquer de sortir sous peu (comme c’est la triste coutume). Une impression qui rend un peu grinçant le seul ressort du scénario, où une grosse compagnie veut supprimer les pièces de rechanges des robots obsolètes pour les forcer à passer par les remises à niveau qu’ils vendent. Hormis une inattendue citation d’un monde à la Metropolis, avec les classes ouvrières cloîtrées dans d’infernales usines souterraines et une classe dominante vivant dans les hauteurs, Robots explique les périls d’un uploading à tout prix.

Une situation dans laquelle Blue sky se retrouve, pressé par son studio commanditaire de livrer un succès obligatoire et familial accompagné d’une performance technique pouvant ridiculiser la concurrence. Wedge et Saldanha ont rempli leur mission en se focalisant sur une évidente créativité, mais y ont sacrifié l’écriture d’un bon scénario. Cette absence est camouflée par des emprunts à des formules qui ont déjà fait leurs preuves ailleurs, chez Disney (Robin Williams au doublage) ou Dreamworks (le grand final musical). Le génie de Williams (plutôt pas mal imité par Elie Seimoun dans la v.f.) amène d’ailleurs par moments l’énergie et surtout une spontanéité qui manque souvent après un prologue réjouissant qui reste la meilleure partie d’un film mécanique dans ses moindres ressorts… Le reste visant essentiellement un public très jeune, le seul qui ne somnolera pas lors des longues et répétitives scènes de poursuites. Robots n’est pas pour autant à mettre à la casse, au vu de certaines séquences très plaisantes, mais s’il surpasse aisément les dernières productions Dreamworks (le très feignant, à tous points de vue, Gang de requins), les rivets n’ont pas été assez bien fixés pour être au niveau des produits Pixar, qui, au vu des peu convaincantes premières images de Madagascar ou L’Age de glace 2, prochains films de leurs concurrents, ne semblent pas prêts d’être déboulonnés de leur position dominante dans le cinéma d’animation.